Grippe : quand les soignants hésitent à se vacciner, ce sont les patients vulnérables qui en paient le prix

17 janvier 2025
Chaque année, la grippe cause 9 000 décès en France. Les victimes ne sont pas des statistiques : ce sont des personnes âgées, des patients immunodéprimés, des malades chroniques. Protéger ces populations vulnérables pourrait passer par une mesure simple et efficace : une meilleure vaccination des professionnels de santé.
Pourtant, les chiffres sont accablants. Moins de 27 % des soignants se vaccinent chaque année contre la grippe. Dans certains établissements, ce taux chute sous les 15 %. À l’échelle nationale, ces données montrent un échec à atteindre l’objectif de 70 % fixé par la stratégie de prévention des infections. Derrière ces chiffres, une réalité inquiétante : des patients fragiles exposés inutilement à un virus qui circule jusque dans les couloirs des hôpitaux.
Près de la moitié des soignants non vaccinés, asymptomatiques ou à peine malades, continuent de travailler. Ils deviennent des vecteurs invisibles de la grippe. Comme le rappelle une étude française, le vaccin est deux fois plus efficace chez les soignants (89 %) que chez les patients eux-mêmes (42 %), dont l’âge ou les comorbidités réduisent les défenses immunitaires. À l’hôpital, la vaccination des soignants n’est donc pas seulement une mesure personnelle, mais un acte de prévention collective.
Thierry Amouroux, porte-parole du syndicat national des professionnels infirmiers SNPI, est intervenu au 20h de France2 le 16.01.15 pour rappeler que les #soignants doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour protéger les plus #vulnérables (#patients hospitalisés ou résidants en #EHPAD #MAS #IME) et pointe une fracture générationnelle. "Les infirmiers les plus anciens se vaccinent chaque année pour protéger leurs patients les plus fragiles. Mais les jeunes infirmiers sont moins sensibles à cette dimension altruiste de la vaccination", explique-t-il. La faible efficacité perçue du vaccin grippal et la généralisation des mesures barrières dans les établissements de soins renforcent leur réticence. "Ils mettent en avant le port du masque et les gestes barrières, arguant que l’hôpital n’est pas un lieu de propagation de la grippe."
https://www.tf1info.fr/sante/verif-19-de-vaccines-contre-la-grippe-comment-expliquer-ce-taux-tres-faible-chez-les-soignants-pointe-par-le-directeur-de-l-ap-hp-2345144.html
Pourtant, les données internationales racontent une autre histoire. Aux États-Unis, l’obligation vaccinale a permis d’atteindre des taux de couverture supérieurs à 90 %, entraînant une réduction notable des cas de grippe nosocomiale, notamment chez les patients immunodéprimés. En France, les études confirment également que l’augmentation de la couverture vaccinale des soignants diminue les risques pour les patients hospitalisés.
Le maintien d’une simple recommandation par la Haute Autorité de Santé (HAS) interroge. Laisser à la seule initiative individuelle une mesure qui pourrait sauver des vies semble en contradiction avec la mission HAS de protection des patients. Les infirmiers, en première ligne pour éduquer et sensibiliser sur la prévention, jouent ici un rôle central. Mais pour être crédibles auprès des patients, l’exemplarité est indispensable.
Les effets indésirables du vaccin grippal sont bénins et temporaires : ressentir une petite douleur, une rougeur ou un gonflement 24h au niveau de l’endroit où le vaccin a été administré. En revanche, les conséquences pour les patients les plus fragiles, exposés à la grippe dans un contexte hospitalier, peuvent être fatales. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 20 000 hospitalisations et 9 000 décès par an. Alors pourquoi si peu de soignants se vaccinent-ils ?
Alors que les hôpitaux français peinent à faire face à la pression des épidémies hivernales, peut-on se permettre de rester passifs face à une telle opportunité de prévention ?
En bout de chaîne, c’est toujours la même question : à quoi bon être soignant si l’on renonce à protéger ceux qui nous font confiance ?