Loi infirmière 2025 : missions, compétences, actes, responsabilités

28 novembre 2025

Analyse complète de la loi infirmière 2025 : compétences, actes, responsabilités, enjeux pour les patients et positions du SNPI.

La loi infir­mière est le texte qui fonde le "cœur du métier" : ce que les infir­miè­res peu­vent faire, ce qu’elles doi­vent faire, et ce que la société attend d’elles. En 2025, sa révi­sion cons­ti­tue un tour­nant majeur. Non seu­le­ment parce que les com­pé­ten­ces infir­miè­res évoluent depuis vingt ans, mais parce que le sys­tème de santé fran­çais tra­verse une crise pro­fonde : pénu­rie de méde­cins, fati­gue des équipes, com­plexité crois­sante des par­cours, perte de sens, renon­ce­ments aux soins. Dans ce contexte, une loi infir­mière moderne doit reconnaî­tre l’exper­tise cli­ni­que, ren­for­cer l’auto­no­mie pro­fes­sion­nelle et sécu­ri­ser les patients.

Cette page pro­pose une ana­lyse com­plète de la loi infir­mière 2025 : son contexte, ses apports, ses limi­tes, les enjeux de sécu­rité, le rôle dans les par­cours de santé, les com­pa­rai­sons inter­na­tio­na­les et les posi­tions défen­dues par le SNPI. Elle est conçue comme une réfé­rence natio­nale pour les pro­fes­sion­nels, les déci­deurs, les jour­na­lis­tes et les étudiants, afin de mieux com­pren­dre les trans­for­ma­tions en cours.

1. Pourquoi une nou­velle loi infir­mière en 2025 ? Un contexte sani­taire trans­formé

1.1. Une pénu­rie mon­diale de soi­gnants

L’OMS, l’OCDE et le CII aler­tent depuis plu­sieurs années : la pla­nète manque d’infir­miè­res. D’ici 2030, il man­quera plus de 13 mil­lions de pro­fes­sion­nels à l’échelle mon­diale. La France n’échappe pas à cette réa­lité : démis­sions, reconver­sions, postes vacants et recours crois­sant à du per­son­nel inté­ri­maire fra­gi­li­sent les orga­ni­sa­tions.

Sans révi­sion des com­pé­ten­ces, impos­si­ble de répon­dre aux besoins de santé publi­que. Les com­pé­ten­ces infir­miè­res évoluent, la for­ma­tion pro­gresse, mais les textes régle­men­tai­res res­taient lar­ge­ment inchan­gés depuis le décret d’exer­cice infir­mier de 2004.

1.2. Des par­cours de soins plus com­plexes

Les patients sont plus âgés, plus sou­vent por­teurs de mala­dies chro­ni­ques, et néces­si­tent un accom­pa­gne­ment long, struc­turé et inter­pro­fes­sion­nel.
Dans la majo­rité des pays euro­péens, ce sont les infir­miè­res qui assu­rent une large part de la pré­ven­tion, des suivis, des dépis­ta­ges et de l’éducation à la santé. La France reste en retard.

1.3. Une perte d’attrac­ti­vité préoc­cu­pante
La loi infir­mière n’est pas qu’un texte tech­ni­que. C’est aussi un signal poli­ti­que. Quand une pro­fes­sion est défi­nie par une régle­men­ta­tion pré­cise, moderne et ali­gnée avec la réa­lité cli­ni­que, elle gagne en reconnais­sance. À l’inverse, un texte flou, daté ou inco­hé­rent entre­tient le sen­ti­ment de déclas­se­ment.

2. Ce que change la loi infir­mière 2025 : les avan­cées et les limi­tes

2.1. Clarification et struc­tu­ra­tion des com­pé­ten­ces

La révi­sion de la loi et des textes régle­men­tai­res d’appli­ca­tion visent à dis­tin­guer clai­re­ment :
 Les soins auto­no­mes, rele­vant de l’exper­tise propre infir­mière ;
 Les soins pres­crits, réa­li­sés sur indi­ca­tion médi­cale ;
 Les soins en col­la­bo­ra­tion, qui mobi­li­sent plu­sieurs pro­fes­sion­nels.

Cette dis­tinc­tion est essen­tielle : elle reflète ce qui se pra­ti­que réel­le­ment sur le ter­rain et amé­liore la sécu­rité juri­di­que des pro­fes­sion­nels.

2.2. Une reconnais­sance par­tielle seu­le­ment du rôle propre

La loi réin­tro­duit et ren­force la notion de diag­nos­tic infir­mier, déjà uti­li­sée à l’inter­na­tio­nal depuis des décen­nies (NANDA-I, Omaha System).
Mais le texte reste pru­dent, par­fois trop. Dans plu­sieurs pays, le diag­nos­tic infir­mier est clai­re­ment défini, ensei­gné et uti­lisé dans les dos­siers patients, car il cons­ti­tue la base de l’auto­no­mie cli­ni­que.

2.3. Une meilleure visi­bi­lité des com­pé­ten­ces infir­miè­res

La loi intè­gre davan­tage :
 l’éducation thé­ra­peu­ti­que,
 le dépis­tage,
 la pré­ven­tion,
 l’orien­ta­tion
 la coor­di­na­tion des par­cours.

2.4. Ce qui manque dans les textes

Trois points majeurs res­tent insuf­fi­sam­ment cou­verts :
 La consul­ta­tion infir­mière, pour­tant ins­crite dans la loi d’accès direct.
 Le rôle infir­mier en santé publi­que, insuf­fi­sam­ment expli­cité.
 L’arti­cu­la­tion cli­ni­que avec les méde­cins, encore trop ver­ti­cale. Dans de nom­breux pays, la loi infir­mière est au contraire cen­trée sur la col­la­bo­ra­tion hori­zon­tale : chaque pro­fes­sion­nel contri­bue à un projet de santé par­tagé, au ser­vice du patient.

Le Syndicat National des Professionnels Infirmiers (SNPI) alerte depuis des années sur ce para­doxe fran­çais : élargir les mis­sions sans aug­men­ter les moyens ni le temps de for­ma­tion. « Ce n’est pas une année de plus, c’est une année pour faire la dif­fé­rence. Refuser d’aug­men­ter la durée de for­ma­tion, c’est priver la France d’un levier prouvé d’amé­lio­ra­tion des soins. C’est, en somme, mettre en péril des vies qui pour­raient être sau­vées." pré­cise Thierry Amouroux, le porte-parole du SNPI.
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Formation-infir­miere-la-France-choi­sit-l-impasse-pen­dant-que-le-monde-avance.html

Les infir­miè­res sont des pro­fes­sion­nel­les auto­no­mes, enga­gées, qui allient com­pé­tence scien­ti­fi­que et enga­ge­ment humain. Leurs mis­sions ne se limi­tent pas au soin tech­ni­que : elles s’étendent à l’ensei­gne­ment, à la ges­tion, à la recher­che, au lea­der­ship et à la défense des droits fon­da­men­taux.
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Redefinir-l-infir­miere-c-est-refon­der-la-sante.html

3. Le décret de com­pé­ten­ces : la clé opé­ra­tion­nelle

Les soins auto­no­mes sont les actes réa­li­sés sans pres­crip­tion médi­cale, par exper­tise propre. Ils cou­vrent :
 l’évaluation cli­ni­que,
 l’obser­va­tion fine des signes,
 la sur­veillance rap­pro­chée,
 la pré­ven­tion, la pro­mo­tion de la santé,
 l’éducation à la santé, l’éducation thé­ra­peu­ti­que,
 la ges­tion des ris­ques,
 l’écoute, l’accom­pa­gne­ment, la rela­tion d’aide,
 l’orga­ni­sa­tion du par­cours de vie, en cocons­truc­tion avec le patient

La force de la pro­fes­sion infir­mière repose pré­ci­sé­ment sur cette capa­cité à voir avant que cela ne se dégrade, à aler­ter, à adap­ter, à pré­ve­nir l’hos­pi­ta­li­sa­tion.

4. Conséquences pour les patients : un accès aux soins faci­lité

4.1. L’accès direct infir­mier

Principal gain pour les patients : moins d’attente, moins de renon­ce­ments, prise en charge pré­coce, meilleure conti­nuité des soins.

4.2. La pré­ven­tion ren­for­cée

Les infir­miè­res sont les pre­miè­res pro­fes­sion­nel­les de proxi­mité :domi­cile, EHPAD, écoles, PMI, santé au tra­vail, milieu péni­ten­tiaire.
Donner des com­pé­ten­ces clai­res en pré­ven­tion, dépis­tage et éducation ren­force direc­te­ment la santé publi­que.

4.3. La sécu­rité des soins

Les études inter­na­tio­na­les sont una­ni­mes : plus il y a d’infir­miè­res com­pé­ten­tes, plus les résul­tats sont bons. Moins il y en a, plus la mor­ta­lité aug­mente.
La loi infir­mière a donc un impact direct sur la sécu­rité : elle défi­nit qui est pré­sent, avec quel niveau de com­pé­tence, sur quels actes.

5. Comparaisons inter­na­tio­na­les : où se situe la France ?

 Canada, Australie, Royaume-Uni : Ces pays ont for­mel­le­ment reconnu : les diag­nos­tics infir­miers, les consul­ta­tions auto­no­mes, les suivis de chro­ni­cité, les rôles élargis en santé publi­que.
 Scandinavie : Modèle exem­plaire : consul­ta­tions infir­miè­res, vac­ci­na­tion sco­laire, dépis­ta­ges, éducation à la santé, suivi des famil­les.
 Espagne, Portugal : Évolutions rapi­des, notam­ment sur les com­pé­ten­ces avan­cées et la reconnais­sance scien­ti­fi­que du ser­vice infir­mier.

6. Positions du SNPI : ce qu’une loi infir­mière doit garan­tir

6.1. Une reconnais­sance claire de l’exper­tise cli­ni­que

 diag­nos­tic infir­mier,
 consul­ta­tion,
 pré­ven­tion,
 coor­di­na­tion,
 orien­ta­tion
 éducation à la santé et éducation thé­ra­peu­ti­que

6.2. Une visi­bi­lité accrue en santé publi­que

Les infir­miè­res doi­vent être au cœur :
 des par­cours de pré­ven­tion,
 du repé­rage pré­coce,
 de la santé envi­ron­ne­men­tale,
 des soins à domi­cile.

6.3. Une arti­cu­la­tion moderne avec les autres pro­fes­sions de santé

La col­la­bo­ra­tion avec les méde­cins n’est pas la subor­di­na­tion. Elle repose sur la com­pé­tence, la confiance, la clarté des rôles.

Le rôle propre infir­mier ne peut être délé­gué qu’à la marge, sur des actes sim­ples et sta­bi­li­sés. Il repose sur un socle de com­pé­ten­ces, de res­pon­sa­bi­li­tés et de réflexions cli­ni­ques que la for­ma­tion aide-soi­gnante ne pré­pare pas à assu­mer. Toute ten­ta­tive de dilu­tion de cette fron­tière serait un recul pour la qua­lité et la sécu­rité des soins. Valoriser l’aide-soi­gnante, c’est reconnaî­tre son rôle spé­ci­fi­que, pas lui confier ce pour quoi elle n’est ni formée, ni pro­té­gée.
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Quelle-partie-du-role-propre-infir­mier-peut-etre-confiee-a-une-aide-soi­gnante.html

6.4. Une loi pro­tec­trice pour les soi­gnants
Plus de clarté = moins de ris­ques juri­di­ques, moins de ten­sions, moins d’ambi­guïté dans l’équipe.

6.5. Un texte aligné avec les stan­dards inter­na­tio­naux
Les infir­miè­res fran­çai­ses doi­vent béné­fi­cier d’un cadre aussi moderne que celui de leurs col­lè­gues euro­péen­nes.

7. Conclusion : une loi qui doit deve­nir un levier de trans­for­ma­tion

La loi infir­mière 2025 n’est pas seu­le­ment un texte pro­fes­sion­nel. C’est un déter­mi­nant majeur de la qua­lité des soins, de la pré­ven­tion, de l’accès aux soins et de la sécu­rité des patients.
Elle permet de reconnaî­tre la com­plexité de la pro­fes­sion, valo­ri­ser les com­pé­ten­ces et l’auto­no­mie cli­ni­que, ren­for­cer la santé publi­que et garan­tir l’attrac­ti­vité de la pro­fes­sion.
C’est une loi qui pro­tège, une loi qui cla­ri­fie, une loi qui donne de la force à un métier essen­tiel au sys­tème de santé.

Voir également :
 https://syn­di­cat-infir­mier.com/Loi-infir­miere-sans-les-decrets-l-acces-aux-soins-reste-bloque.html
 https://syn­di­cat-infir­mier.com/Redefinir-l-infir­miere-c-est-refon­der-la-sante.html
 https://syn­di­cat-infir­mier.com/Infirmieres-face-aux-ine­ga­li­tes-de-sante-aller-vers-la-jus­tice-sociale.html
 https://syn­di­cat-infir­mier.com/Soigner-avec-rai­son­ne­ment-cli­ni­que-les-don­nees-pro­ban­tes-au-coeur-de-la.html
 https://syn­di­cat-infir­mier.com/Donnees-pro­ban­tes-et-lien-de-confiance-l-art-infir­mier-de-la-deci­sion-par­ta­gee.html

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