Décryptage de l’ordonnance sur congés payés, RTT et repos dominical.

31 mars 2020
Le gouvernement a profité de la crise sanitaire pour s’attaquer de nouveau au code du travail, avec un texte d’urgence qui remet en cause CA, RTT, 35 heures au delà de la période épidémique : en sortant du confinement nous serons taillables et corvéables à merci. Ci-dessous l’analyse de la confédération CFE-CGC.
Article 1 : Congés payés
Afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19, ...un accord d’entreprise, ou à défaut un accord de branche, peut déterminer les conditions dans lesquelles l’employeur est autorisé, dans la limite de six jours de congés et sous réserve de respecter un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc, à décider de la prise de jours de congés payés acquis par un salarié, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris, ou à modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés.
L’accord mentionné au premier alinéa peut autoriser l’employeur à fractionner les congés sans être tenu de recueillir l’accord du salarié et à fixer les dates des congés sans être tenu d’accorder un congé simultané à des conjoints ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans son entreprise. La période de congés imposée ou modifiée en application du présent article ne peut s’étendre au delà du 31 décembre 2020.
Articles 2, 3, 4 et 5 : jours de repos, JRTT, et jours épargnés sur un CET
Si l’entreprise rencontre des difficultés économiques en raison de la propagation du Covid-19, l’employeur peut déroger aux règles contenues dans le Code du travail et dans les accords collectifs applicables à l’entreprise pour :
Imposer la prise de jours de réduction du temps de travail (JRTT), de jours épargnés sur un compte épargne temps (CET), ou de jours de repos d’un salarié en forfait-jours, jours dont le nombre varie chaque année en fonction du nombre de jours fériés chômés
Modifier unilatéralement la date de jours de repos ou de JRTT déjà posés par un salarié.
Conditions apportées à l’exercice de ce droit dérogatoire de l’employeur :
L’entreprise doit rencontrer des difficultés économiques en raison de la propagation du Covid19.
L’employeur doit respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
Quelle que soit la catégorie des jours concernés (JRTT, jours de repos, jours épargnés), et qu’il s’agisse de modifier leur date de prise ou de les imposer, la décision de l’employeur ne pourra concerner plus de 10 jours au total.
Cette possibilité de dérogation cessera à compter du 31 décembre 2020, et les jours imposés ou modifiés ne pourront être positionnés au-delà de cette date.
Article 6 : dérogations à la durée du travail
Cette ordonnance permet à l’employeur de décider seul de déroger à la durée du travail. L’ordonnance prévoyant uniquement une information du CSE et de la Direccte dès qu’il use de ces dérogations. Cette information doit être faite sans délais et par tout moyen. La rédaction de l’ordonnance laisse à penser que le CSE pourrait être consulté a posteriori.
Pour la CFE-CGC, cette solution adoptée par l’ordonnance est déplorable dans la mesure ou beaucoup de ces dérogations existaient déjà dans le Code du travail. Il suffisait juste de pratiquer le dialogue social en les négociant. A croire que le seul but de ce texte était d’éviter la négociation collective.
Les dérogations permises par l’ordonnance sont en matière de :
1. Durée quotidienne du travail (L. 3121-18) : possibilité de la fixer à 12h au lieu de 10 h
2. Durée quotidienne maximale de travail pour un travailleur de nuit (L. 31226) : possibilité de la fixer à 12 h au lieu de 8 h. Cette possibilité est toutefois soumise à l’attribution de repos compensateur équivalent au dépassement de la durée de 8 h.
3. Durée du repos quotidien (L. 3131-1) : cette durée peut être portée à 9h au lieu de 11h. Dans ce cas, l’ordonnance prévoit également l’attribution d’un repos compensateur équivalent à la durée du repos dont le salarié a été privé.
4. Durée hebdomadaire maximale (L. 3121-20) : fixation de cette durée à 60h au lieu de 48h.
5. La durée hebdomadaire moyenne de travail calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives (L3121-22) ou 12 mois pour les exploitations, entreprises, établissements et employeurs mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 722-1 et aux 2°, 3° et 6° de l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime et ayant une activité de production agricole : passage à 48h au lieu de 44h.
6. La durée hebdomadaire de travail du travailleur de nuit calculée sur une période de douze semaines (L3122-7) : possibilité de passer à 44h au lieu de 40h.
A noter : en contrepartie de cette augmentation de durée de travail, ces heures seront rémunérées en heures supplémentaires.
Article 7 : repos dominical
Cette possibilité de dérogation au repos dominical est élargie aux entreprises qui assurent des prestations nécessaires à l’accomplissement de l’activité principale des entreprises essentielles. Ce point mérite d’être précisé : qu’est-ce qu’une prestation nécessaire ? Avec cette stipulation cette dérogation est susceptible de concerner beaucoup d’entreprises.