Infirmières Puéricultrices : une expertise globale de santé publique en vue de l’intérêt supérieur de l’enfant

19 décembre 2010

Position adoptée par le Conseil national de l’Ordre des infirmiers le 7 décembre 2010

La pué­ri­culture et la pédia­trie concer­nent l’enfant de la nais­sance à l’ado­les­cence (0-18 ans), au sein de sa famille et de son envi­ron­ne­ment de vie. Dans ce champ, les infir­miè­res et infir­miers spé­cia­li­sés en pué­ri­culture sont des acteurs majeurs, tant pour la pré­ven­tion et l’évaluation des fac­teurs de ris­ques que pour les soins de haute tech­ni­cité dans les situa­tions de grande vul­né­ra­bi­lité ou le suivi global et coor­donné des enfants et des ado­les­cents.

La loi du 9 août 2004 rela­tive à la poli­ti­que de santé publi­que a fixé des objec­tifs ambi­tieux, visant à dimi­nuer le taux de com­pli­ca­tion des gros­ses­ses et la fré­quence des situa­tions péri­na­ta­les à l’ori­gine de han­di­caps à long terme, ainsi que la mor­ta­lité péri­na­tale et infan­tile.

En 2005, le Plan Périnatalité décli­nait ces enjeux en cinq axes stra­té­gi­ques : la qua­lité etla sécu­rité de la prise en charge, la proxi­mité, l’huma­ni­sa­tion du suivi pro­posé et une meilleure reconnais­sance des pro­fes­sion­nels de la nais­sance, dont l’infir­mière pué­ri­cultrice est l’un des maillons essen­tiels.

Le rôle de l’infir­mière pué­ri­cultrice en ser­vice de péri­na­ta­lité a fait l’objet d’une atten­tion par­ti­cu­lière de la part de la Cour des comp­tes dans son rap­port public de 2006 por­tant sur « La poli­ti­que de Périnatalité ». Selon ce rap­port, « Bien que la pré­sence de pué­ri­cultri­ces soit jus­ti­fiée dans les unités de néo­na­to­lo­gie, notam­ment pour la sur­veillance du régime ali­men­taire du nour­ris­son et pour les soins du nou­veau-né en réa­ni­ma­tion, il n’en existe pas tou­jours en raison de l’insuf­fi­sance de can­di­dats : nombre des infir­miè­res deve­nues pué­ri­cultri­ces après for­ma­tion optent en effet pour des emplois non hos­pi­ta­liers (crè­ches, PMI). Leur fonc­tion est alors assu­rée par des infir­miè­res non spé­cia­li­sées. L’auxi­liaire de pué­ri­culture pour sa part dis­pense des soins à l’enfant, sous la res­pon­sa­bi­lité de l’infir­mier. Le ratio pro­posé par les pro­fes­sion­nels est d’une auxi­liaire pour deux infir­miè­res ou pué­ri­cultri­ces. »

La loi du 5 mars 2007 por­tant réforme de la pro­tec­tion de l’enfance a fait de la pré­ven­tion un axe majeur de cette pro­tec­tion. Elle vise à pré­ve­nir le plus en amont pos­si­ble les ris­ques de mise en danger de l’enfant, en évitant qu’ils ne sur­vien­nent ou en limi­tant leurs effets. Cette ambi­tion de pro­tec­tion se décline sur trois axes : la pré­ven­tion péri­na­tale, la pré­ven­tion des dif­fi­cultés éducatives paren­ta­les, la pré­ven­tion en faveur des enfants et des ado­les­cents.

Pour ce qui concerne les ado­les­cents, le Plan Santé-jeunes 16-25 par­venu à échéance en 2010 a pri­vi­lé­gié la lutte contre les com­por­te­ments à ris­ques, notam­ment addic­tifs (dont l’impor­tance est également sou­li­gnée dans le Plan Addictions 2007-2011), la prise en charge de la vul­né­ra­bi­lité psy­chi­que et le déploie­ment de véri­ta­bles actions de pro­mo­tion de la santé auprès des jeunes.

Dans le domaine des han­di­caps, le repé­rage pré­coce des trou­bles du déve­lop­pe­ment chez le jeune enfant, qui tou­chent un enfant sur 150 en moyenne et dont le Plan Autisme 2008-2010 s’est fait l’écho, impli­que une mobi­li­sa­tion de l’ensem­ble des pro­fes­sion­nels et ser­vi­ces de pre­mière ligne. En par­ti­cu­lier les ser­vi­ces de PMI, au sein des­quels les infir­miè­res pué­ri­cultri­ces agis­sent au quo­ti­dien auprès des famil­les.

Les infir­miè­res pué­ri­cultri­ces agis­sent également tous les jours en faveur de la pré­ven­tion pri­maire par le suivi du risque infec­tieux en popu­la­tion géné­rale et des popu­la­tions expo­sées, notam­ment lors des exa­mens de santé obli­ga­toi­res chez l’enfant. Le Programme natio­nal Nutrition Santé 2006-2010 a repris l’objec­tif d’inter­rom­pre la pro­gres­sion de la pré­va­lence du sur­poids et de l’obé­sité chez les enfants. L’évaluation de ses résul­tats a conclu à la néces­sité de pour­sui­vre les efforts de réduc­tion des iné­ga­li­tés socia­les en matière de nutri­tion. Elle pré­co­nise le déve­lop­pe­ment de mesu­res favo­ri­sant la pra­ti­que de l’acti­vité phy­si­que au quo­ti­dien, en cohé­rence avec les objec­tifs du Plan Obésité.

Au coeur de tous ces pro­gram­mes de santé publi­que, l’exer­cice infir­mier en pué­ri­culture est réparti et diffus dans plu­sieurs sec­teurs d’acti­vité, auprès de popu­la­tions dif­fé­ren­tes et selon des contex­tes sociaux hété­ro­gè­nes. Cet éclatement de l’exer­cice crée à la fois sa richesse, son poten­tiel d’attrac­ti­vité mais aussi son manque de visi­bi­lité.

L’ONI, par la pré­sente posi­tion ordi­nale, entend contri­buer à ren­for­cer la visi­bi­lité des infir­miè­res et infir­miers spé­cia­li­sés en pué­ri­culture qui, dès les pre­miers moments de la vie de l’enfant jusqu’à son pas­sage à l’âge adulte, agis­sent sans relâ­che en faveur de la meilleure santé pos­si­ble des nou­vel­les géné­ra­tions.

L’ampleur des pro­blè­mes à résou­dre, notam­ment dans le domaine de petite enfance, montre clai­re­ment, selon le rap­port de la Cour des Comptes, qu’il est urgent de « redé­fi­nir les pra­ti­ques, les condi­tions d’exer­cice et les res­pon­sa­bi­li­tés des divers pro­fes­sion­nels de santé (obs­té­tri­ciens, pédia­tres, sages-femmes, pué­ri­cultri­ces) ».

Les pro­blè­mes de la santé glo­bale de l’enfant et de l’ado­les­cent

Plusieurs appro­ches sont pos­si­bles pour recen­ser les pro­blè­mes de la santé glo­bale de l’enfant et de l’ado­les­cent : en fonc­tion de leurs dif­fé­rents âges ou selon les fac­teurs de ris­ques, l’émergence des patho­lo­gies ou l’impact d’une mala­die chro­ni­que.

L’exer­cice infir­mier en pué­ri­culture, quant à lui, s’ins­crit dans une vision holis­ti­que et inté­gra­tive de l’enfant dans son envi­ron­ne­ment. Il semble donc per­ti­nent d’abor­der ces enjeux sous l’angle des prio­ri­tés de santé publi­que, où l’infir­mière inves­tit son exper­tise cli­ni­que et fonc­tion­nelle dans l’inter­ven­tion et l’accom­pa­gne­ment au quo­ti­dien.

L’action de l’infir­mière pué­ri­cultrice se fonde sur une com­pré­hen­sion des situa­tions qui inclut les dif­fé­rents niveaux de vul­né­ra­bi­lité de l’enfant :
 vul­né­ra­bi­lité géné­ti­que, avec, entre autres, les soins dans les mala­dies rares ;
 vul­né­ra­bi­lité soma­ti­que dans le cadre des mala­dies chro­ni­ques, avec le repé­rage des fac­teurs de ris­ques, leur dépis­tage, l’évaluation des patho­lo­gies et la mise en oeuvre coor­don­née des plans de soins requis ;
 vul­né­ra­bi­lité psy­chi­que, avec la prise en compte des trou­bles du déve­lop­pe­ment mais aussi de l’impact psy­cho­lo­gi­que pour l’enfant et sa famille des pro­blè­mes de santé repé­rés ;
 vul­né­ra­bi­lité sociale, avec l’objec­tif de réduire les iné­ga­li­tés d’accès aux soins pour limi­ter la perte de chance et amé­lio­rer la qua­lité de vie.

La prise en compte glo­bale de ces vul­né­ra­bi­li­tés pos­si­bles asso­cie :
 l’anti­ci­pa­tion et le repé­rage des fac­teurs de ris­ques ;
 l’évaluation et le suivi des trou­bles et patho­lo­gies diag­nos­ti­qués ;
 la prise en compte des consé­quen­ces pos­si­bles en termes de han­di­cap, d’impact et de charge pour les aidants natu­rels et la qua­lité de vie.

L’anti­ci­pa­tion et le repé­rage des fac­teurs de ris­ques s’impo­sent de façon cru­ciale et par­fois tra­gi­que en cas de grande pré­ma­tu­rité, ou pour des nou­veau-nés très fra­gi­les au deve­nir incer­tain à court terme et pour les­quels le pro­nos­tic vital peut être engagé. L’aug­men­ta­tion du nombre de grands pré­ma­tu­rés, les comor­bi­di­tés impor­tan­tes et les consé­quen­ces neuro-déve­lop­pe­men­ta­les qui en résul­tent néces­si­tent des actes très spé­cia­li­sés, tou­jours en équipe, sou­vent dans un contexte d’urgence, de stress et de détresse paren­tale impor­tante, qui exi­gent un haut niveau d’exper­tise infir­mière. Le même niveau de vigi­lance cli­ni­que est requis pour la pré­ven­tion de la mort inat­ten­due du nour­ris­son.

Au cours des pre­miers temps de la vie, les enjeux se por­tent sur le dépis­tage des affec­tions pos­si­bles, des mala­dies chro­ni­ques poten­tiel­les, dont les mala­dies méta­bo­li­ques, du risque de han­di­caps, notam­ment sen­so­riels, sur le repé­rage d’éventuels trou­bles du déve­lop­pe­ment en tenant compte des inte­rac­tions pré­co­ces mère-enfant, en par­ti­cu­lier quand la situa­tion sociale et fami­liale est com­plexe et fra­gile. Les dif­fé­rents exa­mens et bilans obli­ga­toi­res chez l’enfant sont autant de points de vigi­lance par­ta­gée, per­met­tant aux pro­fes­sion­nels de santé, dont l’infir­mière pué­ri­cultrice, d’effec­tuer ce suivi régu­lier de proxi­mité.

Enfin, les pro­blè­mes des ado­les­cents se révè­lent dans les addic­tions et les condui­tes à risque, et plus géné­ra­le­ment dans une vul­né­ra­bi­lité psy­chi­que pou­vant conduire cer­tains jusqu’au sui­cide.

Le suivi des mala­dies chro­ni­ques chez l’enfant cons­ti­tue le second champ impor­tant d’inter­ven­tion de l’infir­mière pué­ri­cultrice. Les trois pre­miè­res caté­go­ries d’affec­tions de longue durée chez l’enfant en 2009 étaient des affec­tions psy­chia­tri­ques (ALD 23). Puis venaient les mala­dies neu­ro­lo­gi­ques et mus­cu­lai­res dont la myo­pa­thie et les épilepsies graves (ALD 9) et enfin les insuf­fi­san­ces res­pi­ra­toi­res chro­ni­ques graves (ALD 14). Autant de pro­blè­mes de santé ren­contrés par l’infir­mière en ser­vice de pédia­trie, de néo­na­to­lo­gie ou en pro­tec­tion mater­nelle et infan­tile.

A la pré­ven­tion et au repé­rage des fac­teurs de ris­ques et au suivi des mala­dies chro­ni­ques, il faut ajou­ter la prise en compte des consé­quen­ces de ces deux pre­miè­res causes de vul­né­ra­bi­lité sur la qua­lité de vie et le deve­nir de l’enfant. L’appro­che glo­bale pra­ti­quée par l’infir­mière pué­ri­cultrice permet d’appré­hen­der leur impact fami­lial et social, la fra­gi­li­sa­tion des liens, les réper­cus­sions socio-économiques et les modi­fi­ca­tions de tra­jec­toire de vie à court et moyen termes pour l’enfant.

Les enjeux liés à l’offre de soins

Les enjeux de santé publi­que pour les enfants et les ado­les­cents tien­nent aussi à la régu­la­tion de l’offre de soins, notam­ment la démo­gra­phie des pro­fes­sions de santé et les contrain­tes régle­men­tai­res :
 Les don­nées rela­ti­ves à la démo­gra­phie des infir­miè­res pué­ri­cultri­ces sont peu fia­bles et dif­fi­ci­le­ment acces­si­bles, compte tenu de l’éclatement des domai­nes d’inter­ven­tion.
 Environ 1 000 infir­miè­res pué­ri­cultri­ces sont for­mées par an pour 15 513 (selon le fichier ADELI au 1er jan­vier 2010) en situa­tion d’emploi, mais 30 % des pué­ri­cultri­ces devaient partir en retraite entre 2009 et 2015. Même si le ratio entre les départs en retraite et les infir­miè­res for­mées sur cette période permet d’équilibrer le nombre de pro­fes­sion­nels en poste, cela ne permet pas de cou­vrir les besoins de santé des enfants, compte tenu de la courbe démo­gra­phi­que ascen­dante et de la com­plexité des situa­tions à pren­dre en charge ;
 De nom­breux postes d’infir­miè­res pué­ri­cultri­ces sont actuel­le­ment occu­pés par des infir­miè­res diplô­mées d’Etat non spé­cia­li­sées, sans qu’il soit pos­si­ble, à ce jour, d’en déter­mi­ner la pro­por­tion de manière assu­rée ;
 Concernant l’exer­cice en établissements d’accueil des jeunes enfants, la néces­sité de créer des nou­vel­les places a conduit à auto­ri­ser, par le décret du 7 juin 2010, l’accueil des enfants en sur­nom­bre (20% de plus pour les struc­tu­res de plus de 40 lits, 15% pour les crè­ches de 20 à 40 places, et 10% pour les plus peti­tes) et à créer de nou­veaux modes d’accueil tels que les jar­dins d’éveil ou les mai­sons d’assis­tants mater­nels. Ces struc­tu­res fonc­tion­nent avec du per­son­nel peu qua­li­fié sans exper­tise spé­cia­li­sée dans le domaine de la petite enfance.
 Dans le même texte, il est prévu une baisse du taux d’enca­dre­ment (de 50 à 40%) des équipes par des pro­fes­sion­nels spé­cia­li­sés tels que les infir­miè­res pué­ri­cultri­ces, les éducateurs jeunes enfants, les infir­miers ou encore les psy­cho­mo­tri­ciens diplô­més d’Etat. Ces mesu­res font peser un risque sur la qua­lité et la sécu­rité requi­ses pour le suivi et l’accom­pa­gne­ment des enfants accueillis.
 L’attrac­ti­vité du métier est notam­ment obérée par la non-reconnais­sance d’un exer­cice libé­ral de l’acti­vité des pué­ri­cultri­ces.
 Elle l’est aussi par les textes et la nomen­cla­ture des actes qui ne reconnais­sent pas la place de la pué­ri­cultrice. Ainsi, le code de la santé publi­que dis­pose que « les actes (infir­miers) concer­nant les enfants de la nais­sance à l’ado­les­cence (…) sont dis­pen­sés en prio­rité » par une pué­ri­cultrice (arti­cle R. 4311-13 du CSP). Cela laisse la pos­si­bi­lité que les fonc­tions et res­pon­sa­bi­li­tés de l’infir­mière pué­ri­cultrice soient assu­rées par une infir­mière diplô­mée d’Etat sans spé­cia­li­sa­tion, voire d’autres pro­fes­sion­nels n’ayant ni la for­ma­tion ni l’expé­rience adé­qua­tes.
 La mobi­lité et l’évolution de car­rière des pué­ri­cultri­ces sont malai­sées, alors que, vu la variété de leurs sec­teurs d’acti­vité et leur contri­bu­tion forte aux poli­ti­ques de santé publi­que, un exer­cice plus diver­si­fié au cours de la vie pro­fes­sion­nelle per­met­trait une meilleure inté­gra­tion des soins et des ser­vi­ces en réseau.
 Du côté des pédia­tres, un peu plus de 7 000 étaient en exer­cice en 2009. Même si ce nombre est en aug­men­ta­tion depuis, de très nom­breux départs à la retraite auront lieu à court terme, du fait de la pyra­mide des âges.
 Les délais d’attente des nou­veau-nés pour un pre­mier rendez-vous chez le pédia­tre s’élèvent en moyenne à 3 mois. Un tiers seu­le­ment des consul­ta­tions des enfants de la nais­sance à 2 ans est assuré par les pédia­tres libé­raux. Le suivi médi­cal des enfants est donc essen­tiel­le­ment assuré par les méde­cins géné­ra­lis­tes.
 Dans ce contexte, la pré­sence des pué­ri­cultri­ces en sec­teur hos­pi­ta­lier, dans le sec­teur de la petite enfance et de la pro­tec­tion mater­nelle et infan­tile en fait de véri­ta­bles pivots dans ce champ du sys­tème de santé, en pre­mière ligne dans le cadre d’un exer­cice com­plé­men­taire de celui des méde­cins et coor­donné avec lui.
 Les nou­vel­les formes de coo­pé­ra­tion et de regrou­pe­ments pré­vues par la loi HPST mais également le projet de réforme des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­ria­les réin­ter­ro­gent la place et la res­pon­sa­bi­lité des dif­fé­rents acteurs de santé. Cela risque par­fois d’entrai­ner une confu­sion des rôles res­pec­tifs, alors même que la demande d’exper­tise cli­ni­que se ren­force compte tenu de la plus grande com­plexité des pro­blè­mes de santé et des situa­tions chez l’enfant et sa famille.

Les valeurs por­tées par les infir­miè­res pué­ri­cultri­ces

Les pra­ti­ques des infir­miers et infir­miè­res spé­cia­li­sées en pué­ri­culture se fon­dent sur des valeurs fortes :
 une vision holis­ti­que de l’enfant et de sa famille dans leur envi­ron­ne­ment ;
 une atti­tude posi­tive incondi­tion­nelle, c’est-à-dire quel­les que soient la situa­tion fami­liale et l’his­toire de la mère ou du père, sans juge­ment de valeur dans la prise en charge de la situa­tion ;
 une action menée dans l’inté­rêt supé­rieur de l’enfant, sa pro­tec­tion et la défense de ses droits ;
 une appro­che inté­gra­tive, coor­don­née et renou­ve­lée de sa pra­ti­que et de ses connais­san­ces.

Le rôle infir­mier en pué­ri­culture

Les infir­miè­res pué­ri­cultri­ces et infir­miers pué­ri­culteurs déve­lop­pent leur exper­tise dans les champs de pra­ti­ques sui­vants :

• Les soins infir­miers spé­ci­fi­ques de la nais­sance à l’ado­les­cence :
 les soins de haute tech­ni­cité et la sur­veillance cli­ni­que de l’enfant en réa­ni­ma­tion, ou dans un contexte d’urgence pou­vant enga­ger le pro­nos­tic vital, néces­si­tant un véri­ta­ble accom­pa­gne­ment en soins pal­lia­tifs de l’enfant et de sa famille ;
 les soins et sur­veillance de l’enfant hos­pi­ta­lisé pour une patho­lo­gie aiguë ou chro­ni­que par un conti­nuum d’inter­ven­tions cli­ni­ques (consul­ta­tion infir­mière, évaluation et orien­ta­tion, coor­di­na­tion du par­cours) ;
 les dépis­ta­ges anté­na­taux sys­té­ma­ti­ques, le dépis­tage des mala­dies chro­ni­ques dans les pre­miers mois et années de la vie et à plus long terme du risque de han­di­cap ;
 les consul­ta­tions infir­miè­res et la par­ti­ci­pa­tion au suivi de gros­sesse et post-natal (infor­ma­tion, valo­ri­sa­tion et accom­pa­gne­ment de l’allai­te­ment mater­nel), suivi au retour à domi­cile, sou­tien aux pre­miers soins (la sortie de la mater­nité se fai­sant après 48 heures dans la majo­rité des cas), sur­veillance de l’ictère du nou­veau-né qui appa­raît de plus en plus à domi­cile, ce qui pose le pro­blème du suivi post-natal ;
 la pro­tec­tion de l’enfance dans le cadre de la loi du 5 mars 2007. Ce texte pré­voit notam­ment que des actions d’accom­pa­gne­ment peu­vent être assu­rées à domi­cile par le ser­vice de PMI, à la suite de l’entre­tien du 4ème mois de gros­sesse. Elle pré­cise que ces actions relè­vent du rôle de l’infir­mière pué­ri­cultrice, pour pré­pa­rer bien à l’avance la venue de l’enfant à naître lors­que la femme enceinte fait part de ses dif­fi­cultés, et notam­ment de ses doutes sur ses capa­ci­tés à s’occu­per de son futur bébé. D’autres actions de pré­ven­tion sont clai­re­ment réfé­rées à l’exper­tise cli­ni­que en pué­ri­culture : la visite à domi­cile dans la période qui suit l’accou­che­ment, afin de conseiller, orien­ter les parents en fonc­tion de leurs besoins – soins de pué­ri­culture, allai­te­ment, sécu­rité domes­ti­que – et de pré­ve­nir des dys­fonc­tion­ne­ments de la rela­tion parent-enfant ; le bilan de santé de l’enfant de 3 à 4 ans pour lequel il est recom­mandé qu’il soit assuré à l’école par un méde­cin de PMI accom­pa­gné par une pué­ri­cultrice ;
 la pré­ven­tion et le dépis­tage pré­coce des trou­bles du déve­lop­pe­ment et des patho­lo­gies neu­ro­lo­gi­ques et psy­chia­tri­ques ;
 la pré­ven­tion des ris­ques infec­tieux et le suivi des vac­ci­na­tions ;
 les soins et tech­ni­ques d’ali­men­ta­tion et d’hydra­ta­tion de la nais­sance à l’ado­les­cence auprès de l’enfant sain et malade ;
 l’appui à la paren­ta­lité et aux inte­rac­tions pré­co­ces mère-enfant ;
 le dépis­tage des ris­ques d’acci­dents domes­ti­ques et les actions de pré­ven­tion auprès des famil­les ;

• Une exper­tise au béné­fice d’une col­la­bo­ra­tion inter­pro­fes­sion­nelle :
 un tra­vail en inter­pro­fes­sion­na­lité cons­tante avec les par­te­nai­res des ser­vi­ces sani­tai­res et sociaux par­ti­ci­pant au suivi des enfants et des famil­les, incluant notam­ment les méde­cins géné­ra­lis­tes et pédia­tres de ville, la pro­tec­tion de l’enfance, la pro­tec­tion judi­ciaire de la jeu­nesse, l’éducation natio­nale, etc. ;
 l’enca­dre­ment et la ges­tion d’équipe, notam­ment dans les struc­tu­res d’accueil de la petite enfance ;
 la par­ti­ci­pa­tion à l’agré­ment des assis­tan­tes mater­nel­les et des struc­tu­res d’accueil de la petite enfance ;
 la for­ma­tion et la trans­mis­sion des savoir-faire auprès des futu­res infir­miè­res et des infir­miè­res en poste, mais aussi de par­te­nai­res ;
 la par­ti­ci­pa­tion à des tra­vaux de recher­che cli­ni­que et aux pro­jets locaux de santé publi­que.

Ce que l’Ordre pro­pose :

L’infir­mière pué­ri­cultrice ou l’infir­mier pué­ri­culteur sont des spé­cia­lis­tes cli­ni­ques experts en pué­ri­culture, pra­ti­quant à la fois une démar­che d’obser­va­tion et d’ana­lyse, la mise en oeuvre d’un rai­son­ne­ment cli­ni­que, l’élaboration d’un projet de soins et d’accom­pa­gne­ment global, des inter­ven­tions coor­don­nées avec les par­te­nai­res. Or, bien que son exper­tise soit réelle et irrem­pla­ça­ble, la spé­cia­lité d’infir­mier spé­cia­lisé en pué­ri­culture manque cruel­le­ment de visi­bi­lité.

L’Ordre sou­haite tra­vailler sans plus atten­dre avec les Pouvoirs publics et les orga­ni­sa­tions pro­fes­sion­nel­les com­pé­ten­tes pour faire reconnaî­tre, pro­mou­voir et déve­lop­per de manière effec­tive l’exper­tise pro­fes­sion­nelle des infir­miè­res et infir­miers spé­cia­li­sés en pué­ri­culture, dans le cadre d’une poli­ti­que de santé publi­que effi­ciente pour les enfants et les ado­les­cents.

Dans cet esprit :

1) Les don­nées por­tant sur la démo­gra­phie de la spé­cia­lité par sec­teur d’acti­vité, son attrac­ti­vité et les freins à son recru­te­ment ou les causes de départ pré­coce devraient être mises à jour et appro­fon­dies.

2) Les infir­miè­res et infir­miers spé­cia­li­sés en pué­ri­culture devraient être confor­tés dans la reconnais­sance de leur rôle spé­ci­fi­que. Cela impli­que notam­ment :
 une défi­ni­tion des actes pro­pres à leur spé­cia­lité et effec­ti­ve­ment réser­vés, dans le cadre de l’arti­cle R. 4311-13, aux titu­lai­res du diplôme d’Etat spé­cia­lisé ;
 la valo­ri­sa­tion de leurs com­pé­ten­ces en enca­dre­ment d’équipes plu­ri­dis­ci­pli­nai­res et/ou géné­ra­lis­tes ;
 l’élaboration par la Haute auto­rité de santé d’une recom­man­da­tion de pra­ti­que pro­fes­sion­nelle rela­tive à une "consul­ta­tion infir­mière" en pué­ri­culture.

Cette consul­ta­tion pour­rait inclure :
 l’infor­ma­tion, l’éducation à la santé et l’éducation thé­ra­peu­ti­que pour les enfants et les ado­les­cents ;
 la pré­ven­tion des ris­ques, l’évaluation et un suivi global et coor­donné, dans des domai­nes déter­mi­nés ;
 des soins infir­miers de haute tech­ni­cité.

3) La pro­duc­tion de connais­san­ces en scien­ces infir­miè­res dans le domaine de la pué­ri­culture. Les leviers pos­si­bles en sont l’émergence de socié­tés savan­tes à l’ini­tia­tive des asso­cia­tions pro­fes­sion­nel­les, l’impul­sion de pro­gram­mes hos­pi­ta­liers de recher­che infir­mière (PHRI) et la par­ti­ci­pa­tion des orga­nis­mes de recher­che en santé.

4) Un cadre et un calen­drier d’évolution des réfé­ren­tiels de com­pé­ten­ces et de for­ma­tion, qui pré­voi­rait notam­ment :
 un socle de com­pé­ten­ces spé­cia­li­sées autour des axes fon­da­men­taux de la pra­ti­que : évaluation des besoins de soins et de santé ; prin­ci­pes et pra­ti­ques de la rela­tion thé­ra­peu­ti­que ; pré­ven­tion des ris­ques ; suivi global et coor­donné en inter­pro­fes­sion­na­lité ; conti­nuité et qua­lité des soins ; sécu­rité des soins et inter­ven­tions d’urgence enga­geant le pro­nos­tic vital de l’enfant ; démar­che réflexive pour la pro­duc­tion de connais­san­ces spé­cia­li­sées en scien­ces infir­miè­res ;
 de véri­ta­bles évolutions enca­drées et évaluées des com­pé­ten­ces pro­fes­sion­nel­les et scien­ti­fi­ques sur le modèle des infir­miè­res de pra­ti­ques avan­cées, à partir des­quel­les seraient déve­lop­pés de nou­vel­les com­pé­ten­ces par­ta­gées entre les infir­miers et infir­miè­res spé­cia­li­sés en pué­ri­culture et les méde­cins ;

5) La mise en oeuvre d’un cursus LMD qui garan­ti­rait la qua­lité et la cohé­rence de ces acqui­si­tions. Ce cursus de spé­cia­li­sa­tion devrait, à partir du socle commun de com­pé­ten­ces infir­miè­res (licence), se pour­sui­vre lors de deux années de spé­cia­li­sa­tion en master (120 ECTS) : spé­cia­li­sa­tion cli­ni­que, pra­ti­ques avan­cées, épidémiologie, pro­to­cole de recher­che cli­ni­que en scien­ces infir­miè­res, pilo­tage de pro­jets de santé publi­que, contri­bu­tion à l’élaboration des recom­man­da­tions de bonnes pra­ti­ques dans la spé­cia­lité.

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