12 mai, Journée internationale de l’infirmière : les infirmières, une force pour le changement

10 mai 2015

La santé de la population mondiale dépend de la disponibilité de professionnels infirmiers bien formés, en nombre adéquat, et rémunérés à hauteur de leurs responsabilités.

La Journée inter­na­tio­nale de l’infir­mière (JII) est célé­brée dans le monde entier le 12 mai, jour anni­ver­saire de la nais­sance de Florence Nightingale. Le CII com­mé­more chaque année cette date impor­tante, et le thème de la jour­née 2015 est "Les infir­miè­res, une force pour le chan­ge­ment : des soins effi­ca­ces et ren­ta­bles."

L’aug­men­ta­tion cons­tante du coût de la santé entraîne une lourde charge finan­cière pour les sys­tè­mes sani­tai­res et pour les popu­la­tions du monde entier. Les infir­miè­res, qui cons­ti­tuent la plus grande pro­fes­sion dans la main-d’oeuvre en santé, sont très bien pla­cées pour obte­nir des gains d’effi­cience et d’effi­ca­cité tout en pro­di­guant des soins de qua­lité et en pro­dui­sant des résul­tats opti­maux pour les patients et pour les popu­la­tions.

Les infir­miè­res com­pren­nent et sont concer­nées par tous les enjeux de la pres­ta­tion des soins de santé, notam­ment le finan­ce­ment, la ren­ta­bi­lité et la ges­tion des res­sour­ces, ainsi que le coût et l’accès aux soins. Les déci­sions que chaque infir­mière est amenée à pren­dre plu­sieurs fois par jour dans sa propre pra­ti­que influen­cent for­te­ment l’effi­cience et l’effi­ca­cité du sys­tème dans son ensem­ble.

Les infir­miè­res jouent un rôle cen­tral pour conci­lier les exi­gen­ces de qua­lité, d’accès et de coût. Infirmières et déci­deurs doi­vent donc insis­ter sur le rôle de la pro­fes­sion infir­mière dans les sys­tè­mes de santé effi­ca­ces et ren­ta­bles. Il s’agit là d’une prio­rité et d’un fac­teur cru­cial pour par­ve­nir à l’équité, assu­rer une cou­ver­ture sani­taire uni­ver­selle et, en fin de compte, amé­lio­rer les résul­tats de santé au niveau mon­dial.

Les infir­miè­res, une force pour le chan­ge­ment : des soins effi­ca­ces et ren­ta­bles : le thème de la Journée inter­na­tio­nale de l’infir­mière en 2015 reflète l’enga­ge­ment du CII pour ren­for­cer et amé­lio­rer les sys­tè­mes de santé. Il sou­li­gne la contri­bu­tion des infir­miè­res et rend compte du fait qu’elles peu­vent, en tant que pro­fes­sion, attein­dre des per­son­nes que d’autres pra­ti­ciens ne voient jamais, en milieu urbain et dans les com­mu­nau­tés rura­les et recu­lées. En bref, il sera impos­si­ble d’attein­dre les objec­tifs sani­tai­res mon­diaux sans la contri­bu­tion et la par­ti­ci­pa­tion acti­ves des infir­miè­res à tous les niveaux du sys­tème de santé.

Effets de la crise économique sur la main-d’oeuvre infir­mière et sur l’accès aux soins

La crise économique qui a éclaté en 2008 a eu un effet dévas­ta­teur sur la main-d’oeuvre infir­mière et sur l’accès aux soins, en frei­nant le recru­te­ment et la dota­tion en effec­tifs, et ce dans le contexte d’une pénu­rie d’infir­miè­res cou­plée à une aug­men­ta­tion de la demande en soins. Nombre de gou­ver­ne­ments ont réduit leurs dépen­ses consa­crées à la santé et, en par­ti­cu­lier, aux soins infir­miers. Les pro­grès de nom­breux pays en déve­lop­pe­ment vers la cou­ver­ture sani­taire uni­ver­selle sont com­pro­mis par le fait qu’ils ne dis­po­sent pas d’effec­tifs de santé en quan­tité suf­fi­sante, déployés de manière judi­cieuse et dotés des com­pé­ten­ces néces­sai­res pour pro­di­guer des ser­vi­ces de qua­lité à l’ensem­ble de la popu­la­tion (OMS 2006).

Mais les pays déve­lop­pés sont eux aussi confron­tés au spec­tre d’une grave pénu­rie de tra­vailleurs de santé, du fait des coupes bud­gé­tai­res impo­sées par la crise économique (Sousa et al. 2013). Certains des pays euro­péens les plus pau­vres, telle la Roumanie, ont dû réduire d’un quart leurs bud­gets natio­naux de santé (International Medical Travel Journal 2011).

La dété­rio­ra­tion des ser­vi­ces et les caren­ces en per­son­nel infir­mier résul­tent des réfor­mes du sec­teur de la santé conco­mi­tan­tes aux pro­gram­mes d’ajus­te­ment struc­tu­rel de la Banque mon­diale et du Fonds moné­taire inter­na­tio­nal. Ces réfor­mes visaient à maî­tri­ser les coûts par une ges­tion plus serrée des salai­res du sec­teur public, une réduc­tion des dépen­ses publi­ques, la pri­va­ti­sa­tion d’entre­pri­ses publi­ques, l’élimination de cer­tai­nes sub­ven­tions, la libé­ra­li­sa­tion de l’économie et la déva­lua­tion des devi­ses natio­na­les (Liese & Dussault 2004).

Les infir­miè­res cons­ti­tuent le plus grand groupe de pro­fes­sion­nels de santé et repré­sen­tent une part impor­tante du coût total des soins de santé. Ceci expli­que que le sec­teur infir­mier est sou­vent le pre­mier touché par les mesu­res d’aus­té­rité économique, avec des effets néga­tifs pour la sécu­rité des patients et pour la qua­lité des soins. À titre d’exem­ple, la crise économique a eu un impact néga­tif sur les infir­miè­res de l’Islande, le pays ayant dû, pour réduire ses coûts, pro­cé­der à des fusions d’ins­ti­tu­tions de santé, à des licen­cie­ments ou com­pres­sions de per­son­nel, de même qu’à des réduc­tions d’heures sup­plé­men­tai­res et de primes.

Toutes ces mesu­res ont entraîné un fort méconten­te­ment (CII 2010). Une étude réa­li­sée dans douze pays euro­péens a montré qu’un pour­cen­tage élevé d’infir­miè­res, insa­tis­fai­tes, avaient l’inten­tion de chan­ger d’emploi. Leur méconten­te­ment était lié aux salai­res et à l’absence de pos­si­bi­li­tés de for­ma­tion et de pers­pec­ti­ves pro­fes­sion­nel­les (Aiken et al. 2013).

Effets néga­tifs des pénu­ries sur les patients

Dans les temps dif­fi­ci­les, les infir­miè­res jouent un rôle cru­cial en aidant le sys­tème à être plus ren­ta­ble en termes de coût et plus effi­cace en termes de soins. Le niveau de dota­tion et l’envi­ron­ne­ment de tra­vail des infir­miè­res influen­cent direc­te­ment les soins aux patients.

Selon un rap­port de la Joint Commission on Accreditation of Healthcare Organizations (États-Unis), la dota­tion insuf­fi­sante joue un rôle dans 24 % des cas de décès de patients, de bles­sure ou de perte fonc­tion­nelle per­ma­nente. Le rap­port indi­que aussi que 90 % des ins­ti­tu­tions de soins à long terme man­quent de per­son­nel infir­mier capa­ble de pro­di­guer ne serait-ce que les soins les plus basi­ques ; et qu’en 2020 les infir­miè­res seront encore moins nom­breu­ses.

Des recher­ches mon­trent que les hôpi­taux où le taux infir­mière/patients est favo­ra­ble enre­gis­trent des taux de mor­ta­lité en baisse (Aiken et al. 2014). À l’inverse, une faible dota­tion en per­son­nel infir­mier, des char­ges de tra­vail plus élevées et l’ins­ta­bi­lité dans les unités de soins infir­miers sont liées à des résul­tats néga­tifs tels que chutes de patients et erreurs de médi­ca­tion (Duffield et al. 2011)

La qua­lité des envi­ron­ne­ments de tra­vail, l’amé­lio­ra­tion du ratio infir­mière/patients sont asso­ciées à une meilleure qua­lité des soins et à des patients plus satis­faits (Aiken et al. 2012). Les auteurs obser­vent également un manque fré­quent de qua­lité des soins hos­pi­ta­liers, pour conclure que l’amé­lio­ra­tion de l’envi­ron­ne­ment de tra­vail à l’hôpi­tal pour­rait être une stra­té­gie rela­ti­ve­ment bon marché pour aug­men­ter la sécu­rité et la qua­lité dans ce contexte et amé­lio­rer la satis­fac­tion des patients.

Du fait de la pénu­rie, les infir­miè­res sont sou­vent contrain­tes de tra­vailler de lon­gues heures sous pres­sion, avec pour corol­laire fati­gue, acci­dents et insa­tis­fac­tion au tra­vail. Dans les pays connais­sant une pénu­rie, les infir­miè­res sont sur­char­gées et épuisées, cer­tai­nes de leurs col­lè­gues ayant quitté le sec­teur pour des postes mieux payés dans le sec­teur privé ou pour de meilleu­res oppor­tu­ni­tés à l’étranger. L’insa­tis­fac­tion au tra­vail aug­mente sous l’effet de char­ges de tra­vail plus élevées, d’horai­res plus longs et faute des res­sour­ces néces­sai­res pour pro­di­guer des soins de qua­lité (Aiken et al. 2013).

Le contenu du dos­sier du JII est télé­char­gea­ble sur : http://www.icn.ch/fr/publi­ca­tions/2015-nurses-a-force-for-change-care-effec­tive-cost-effec­tive/

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