Boissons énergisantes : dangers et recommandations de l’Anses

ANSES boissons énergisantes

4 octobre 2013

Dans un avis du 6 septembre 2013 concernant l’évaluation des risques liés à la consommation de boissons dites énergisantes, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande d’éviter la consommation de ce type de boissons en association avec l’alcool ou lors d’un exercice physique.

Les bois­sons dites énergisantes sont des sodas enri­chis en sub­stan­ces déjà pré­sen­tes dans l’ali­men­ta­tion (caféine, tau­rine, vita­mi­nes,...) et qui ont essen­tiel­le­ment en commun leur teneur en caféine (équivalente en moyenne à deux expres­sos). Cette com­po­si­tion en fait des bois­sons « exci­tan­tes » qui peu­vent lorsqu’elles sont asso­ciées à cer­tains modes de consom­ma­tion (alcool, sport,…) géné­rer des acci­dents car­dia­ques graves chez les consom­ma­teurs por­teurs de pré­dis­po­si­tions géné­ti­ques fré­quen­tes (1 indi­vidu sur 1000) et géné­ra­le­ment non diag­nos­ti­quées.

L’Anses recom­mande donc d’éviter la consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes en asso­cia­tion avec de l’alcool ou lors d’un exer­cice phy­si­que. Elle appelle aussi, compte tenu des pra­ti­ques de consom­ma­tion cons­ta­tées, à la mise en oeuvre de mesu­res visant à enca­drer la pro­mo­tion de ces bois­sons envers les publics sen­si­bles (enfants et ado­les­cents) et dans des contex­tes de consom­ma­tion à ris­ques (fes­tifs, spor­tifs, …).

Par ailleurs l’Agence appelle l’ensem­ble de la popu­la­tion à modé­rer sa consom­ma­tion de bois­sons caféi­nées, et plus par­ti­cu­liè­re­ment les enfants, ado­les­cents, les femmes encein­tes et allai­tan­tes.

Le terme « bois­son énergisante » est un terme com­mer­cial qui ne fait pas réfé­rence à un enca­dre­ment régle­men­taire spé­ci­fi­que. Les bois­sons dites énergisantes (BDE) sont des sodas enri­chis en diver­ses sub­stan­ces déjà pré­sen­tes dans l’ali­men­ta­tion (caféine, gua­rana, tau­rine, vita­mi­nes, gin­seng,...).

L’Anses a recensé plus d’une cen­taine de ces bois­sons sur le marché fran­çais. Elles ont une com­po­si­tion rela­ti­ve­ment hété­ro­gène sauf en matière de caféine, pré­sente quasi-sys­té­ma­ti­que­ment dans ces bois­sons. La consom­ma­tion d’une canette stan­dard (250 ml) de bois­sons dites énergisantes apporte en moyenne l’équivalent en caféine de deux cafés « expres­sos » (50 ml) ou de plus de deux canet­tes de sodas au cola (330 ml).

La ques­tion de la sécu­rité des bois­sons dites énergisantes est suivie par l’Anses depuis plu­sieurs années. L’Agence recueille à ce titre, dans le cadre du dis­po­si­tif de nutri­vi­gi­lance, les effets indé­si­ra­bles sus­pec­tés d’être liés à la consom­ma­tion de ces pro­duits. L’Anses, par voie de com­mu­ni­qué de presse, a invité en juin 2012 les pro­fes­sion­nels de santé à lui faire remon­ter un maxi­mum de décla­ra­tions. Plus de 200 cas lui ont ainsi été signa­lés, por­tant au final à 257 le nombre de cas rap­por­tés dont 212 suf­fi­sam­ment ren­sei­gnés pour être ana­ly­sés dans le cadre de l’évaluation des ris­ques liée à la consom­ma­tion des bois­sons dites énergisantes publiée ce jour.

L’impu­ta­bi­lité de la consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes dans la sur­ve­nue de ces évènements indé­si­ra­bles a été jugée, selon les cri­tè­res de la nutri­vi­gi­lance, très vrai­sem­bla­ble ou vrai­sem­bla­ble pour 25 cas, soit 12 % des signa­le­ments. Les prin­ci­paux symp­tô­mes obser­vés parmi ces der­niers sont essen­tiel­le­ment : car­dio­vas­cu­lai­res (sen­sa­tions d’oppres­sion ou de dou­leurs tho­ra­ci­ques, tachy­car­die, hyper­ten­sion, trou­bles du rythme allant jusqu’à l’arrêt car­dia­que...), psycho-com­por­te­men­taux ou neu­ro­lo­gi­ques (irri­ta­bi­lité, ner­vo­sité, anxiété, voire crises de pani­que, hal­lu­ci­na­tions, épilepsie).

L’Anses consi­dère que les arrêts car­dia­ques signa­lés dans le dis­po­si­tif de nutri­vi­gi­lance et ceux rap­por­tés dans la lit­té­ra­ture sur­vien­nent très vrai­sem­bla­ble­ment chez des sujets géné­ti­que­ment pré­dis­po­sés. Ces pré­dis­po­si­tions fré­quen­tes (cana­lo­pa­thies) sont la plu­part du temps asymp­to­ma­ti­ques et géné­ra­le­ment non diag­nos­ti­quées. Elles peu­vent tou­cher envi­ron 1 indi­vidu sur 1000. Les arrêts car­dia­ques chez ces sujets résul­te­raient de la consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes asso­ciée à cer­tains fac­teurs de risque sup­plé­men­tai­res comme l’exer­cice phy­si­que (sport, danse,...), une forte consom­ma­tion d’alcool, l’hypo­ka­lié­mie, cer­tains médi­ca­ments ou une sen­si­bi­lité indi­vi­duelle à la caféine.

Les autres effets étudiés (car­dio­vas­cu­lai­res, psycho-com­por­te­men­taux ou neu­ro­lo­gi­ques) cor­res­pon­dent à des effets indé­si­ra­bles cou­ram­ment obser­vés après une prise de caféine en quan­tité élevée. A l’issue de l’ana­lyse des cas de nutri­vi­gi­lance et des don­nées biblio­gra­phi­ques, la caféine de ces bois­sons a été consi­dé­rée comme le fac­teur expli­ca­tif majeur.

La caféine, molé­cule natu­rel­le­ment pré­sente dans plus de 60 plan­tes (café, thé, kola, gua­rana, maté,…), est bien connue pour ses effets « exci­tants » et ses effets indé­si­ra­bles nom­breux : anxiété, tachy­car­die, trou­bles du som­meil, ris­ques chez l’enfant de déve­lop­pe­ment ulté­rieur de condui­tes addic­ti­ves. Il existe dans la popu­la­tion géné­rale une très grande varia­bi­lité de la sen­si­bi­lité aux effets de la caféine. En se basant sur les dif­fé­rents seuils fai­sant réfé­rence inter­na­tio­na­le­ment, on peut cons­ta­ter qu’une frac­tion non négli­gea­ble de la popu­la­tion fran­çaise dépasse les niveaux de caféine conseillés :
- envi­ron 30 % de la popu­la­tion adulte est en dépas­se­ment pour le seuil retenu comme géné­ra­teur d’anxiété (cor­res­pon­dant pour un adulte à l’apport en caféine d’envi­ron 6 expres­sos) ;
- près de 7 % de la popu­la­tion adulte excède le seuil au-delà duquel une toxi­cité chro­ni­que plus géné­rale est sus­pec­tée (santé osseuse et car­dio­vas­cu­laire, cancer, fer­ti­lité mas­cu­line,...) ;
- 11 % des 3 à 10 ans et 7 % des 11 à 14 ans dépas­sent le seuil de déve­lop­pe­ment d’une tolé­rance à la caféine et du déclen­che­ment de symp­tô­mes de sevrage (atteint à moins d’une demi-canette stan­dard de bois­sons dites énergisantes ou d’une canette de soda au cola pour un enfant de 35 kg).

Même si la caféine a un usage très ancien dans le monde entier, sa pré­sen­ta­tion sous forme de bois­sons dites énergisantes, phé­no­mène nou­veau et en forte expan­sion, fait évoluer les moda­li­tés de consom­ma­tion, qui :
- tou­chent des consom­ma­teurs jusque là peu expo­sés à la caféine, notam­ment les enfants et les ado­les­cents qui, au niveau euro­péen, sont res­pec­ti­ve­ment 3 et 8 % à consom­mer des bois­sons dites énergisantes plus de 4 à 5 fois par semaine ;
- ont par­fois lieu dans des quan­ti­tés élevées : 25 % des consom­ma­teurs fran­çais de bois­sons dites énergisantes consom­ment plus de 500 ml sur une même jour­née ;
- sur­vien­nent dans de nou­veaux contex­tes d’expo­si­tion : en France, envi­ron 32 % des consom­ma­teurs de bois­sons dites énergisantes les consom­ment lors d’occa­sions fes­ti­ves (bars, dis­co­thè­ques, concerts, etc.), 41 % en lien avec une acti­vité spor­tive, 16 % en mélange avec de l’alcool.

L’Anses consi­dère que la mul­ti­pli­ca­tion des sour­ces de caféine, notam­ment via les bois­sons dites énergisantes, com­bi­née aux modes de consom­ma­tion actuels de ces bois­sons est sus­cep­ti­ble de géné­rer des situa­tions à risque.

L’Agence recom­mande donc aux consom­ma­teurs :
- 1. d’éviter la consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes en asso­cia­tion avec l’alcool ou lors d’un exer­cice phy­si­que ;
- 2. d’être par­ti­cu­liè­re­ment vigi­lants vis-à-vis des apports en caféine, notam­ment via les bois­sons dites énergisantes, pour cer­tains consom­ma­teurs, en par­ti­cu­lier : les femmes encein­tes et allai­tan­tes, les enfants et ado­les­cents, les per­son­nes sen­si­bles aux effets de la caféine ou pré­sen­tant cer­tai­nes patho­lo­gies notam­ment cer­tains trou­bles cardio-vas­cu­lai­res, psy­chia­tri­ques et neu­ro­lo­gi­ques, insuf­fi­sance rénale, mala­dies hépa­ti­ques sévè­res ;
- 3. et d’une façon géné­rale, pour l’ensem­ble des consom­ma­teurs, de -modé­rer la consom­ma­tion de bois­sons caféi­nées.

Par ailleurs, l’Agence appelle les pro­fes­sion­nels de santé, et plus par­ti­cu­liè­re­ment les méde­cins, à :
- 1. inté­grer la notion de consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes au recueil d’infor­ma­tion face à des patients pré­sen­tant des symp­tô­mes évocateurs (trou­bles paroxys­ti­ques de l’exci­ta­bi­lité car­dia­que, pous­sées hyper­ten­si­ves, crises convul­si­ves,…) et à deman­der dans ces situa­tions une mesure de la caféi­né­mie le plus pré­co­ce­ment pos­si­ble ;
- 2. pour­sui­vre les signa­le­ments à l’Anses de tout nou­veau cas d’effet indé­si­ra­ble sus­pecté d’être lié à la consom­ma­tion de bois­sons dites énergisantes.

Enfin, l’Anses note également l’émergence au niveau inter­na­tio­nal (Canada, Etats-Unis, Lituanie, etc.) de poli­ti­ques publi­ques visant à enca­drer le marché des bois­sons dites énergisantes. Constatant l’écart entre les recom­man­da­tions de l’Agence et les pra­ti­ques obser­vées en France, et le défi­cit d’infor­ma­tion du public, l’Anses appelle à la mise en oeuvre de mesu­res visant à garan­tir l’infor­ma­tion des publics sen­si­bles, et à enca­drer la pro­mo­tion des bois­sons dites énergisantes envers ces popu­la­tions et dans des contex­tes de consom­ma­tion à ris­ques (fes­tifs, spor­tifs, …).

Pour en savoir plus :
http://www.anses.fr/fr/docu­ments/PRES2013CPA15.pdf

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