Communiqué : dérives technologiques à l’hôpital !

12 février 2007

Dans le cadre du projet euro­péen IWARD (financé par l’Union Européenne), des scien­ti­fi­ques anglais et alle­mands met­tent au point des "robots infir­miers" qui d’ici trois ans doi­vent être intro­duits dans des hôpi­taux. Une manière de résou­dre la pénu­rie infir­mière qui est mon­diale, et va s’aggra­ver avec les départs en retraite.

L’objec­tifs de IWARD est de mettre en place dans des hôpi­taux en 2010 trois sortes de « robots infir­miers » : réveillez-vous, ils sont deve­nus fous !

Les "robots infir­miers" devraient accom­plir des tâches de "tech­ni­ciens de sur­face". Mais les robots seraient aussi capa­bles de réa­li­ser des tâches infir­miè­res, telles que la dis­tri­bu­tion des com­pri­més, la prise de tem­pé­ra­ture à dis­tance avec un appa­reil laser ou le contrôle de la pres­sion arté­rielle. Les robots seraient même capa­bles de com­mu­ni­quer avec les patients et d’envoyer des mes­sa­ges au per­son­nel.

Après, on peut tou­jours parler d’huma­ni­sa­tion des hôpi­taux, et de res­pect des droits des mala­des ! Si cer­tains peu­vent être admi­ra­tifs devant les pro­grès de la robo­ti­que, nous pré­fé­rons reven­di­quer un posi­tion­ne­ment d’huma­nis­tes archaï­ques !

Thomas Schlegel, de l’ins­ti­tut Fraunhofer, qui est à la tête de l’équipe de recher­che, expli­que que « le prin­cipe n’est pas que d’avoir des robots mobi­les, mais bien de déve­lop­per un sys­tème de bornes mou­van­tes offrant à la fois l’infor­ma­tion et l’assis­tance aux gens, de façon à ce que l’hôpi­tal devienne un lieu inte­rac­tif et intel­li­gent » (parce que aujourd’hui ce n’est pas le cas ?).

Mis en chan­tier par les uni­ver­si­tés euro­péen­nes de Cardiff, Dublin, Newcastle et Warwick, selon le Dr Schlegel, « IWARD per­met­tra aux mem­bres du per­son­nel hos­pi­ta­lier de consa­crer plus de temps à leurs patients plutôt que de s’adon­ner à d’autres tâches élémentaires ». Encore une preuve que l’enfer est pavé de bonnes inten­tions !

Un visi­teur pour­rait donner le nom d’un patient et un robot le mène­rait à son chevet (bon­jour le secret de l’hos­pi­ta­li­sa­tion !). Si le robot le plus proche n’était pas sûr de l’endroit, il pour­rait com­mu­ni­quer avec d’autres pour avoir de l’aide.

Chaque robot sera équipé de cap­teurs pour éviter des col­li­sions. Des "tech­no­lo­gies facia­les d’iden­ti­fi­ca­tion" seront uti­li­sées, ainsi les robots pour­raient repé­rer si une per­sonne non auto­ri­sée était entrée. Le projet ne pré­cise pas si les robots doi­vent « neu­tra­li­ser » la per­sonne non agréée, ni s’il y a un bouton « d’arrêt d’urgence » en cas de dys­fonc­tion­ne­ment du robot !

Entre la volonté de tout ratio­na­li­ser, pour réa­li­ser tou­jours plus d’économie, et les déli­res tech­no­lo­gi­ques de cer­tains, on cher­che a trans­for­mer l’hôpi­tal en un « centre de pres­ta­tions sani­tai­res ». Mais on ne peut rem­pla­cer les humains par des robots comme dans les usines auto­mo­bi­les, car nous ne cons­trui­sons pas des objets, nous soi­gnons d’autres êtres humains.

Les soins infir­miers décou­lent en effet des deux faces du concept « soi­gner » : trai­ter la mala­die, et pren­dre soin de la per­sonne. L’infir­mière repré­sente avant tout une pré­sence, qui défend la valeur et la dignité humaine du malade au sein de l’uni­vers hos­pi­talo-cen­triste, en rap­pe­lant qu’il est en lui-même une fin, c’est-à-dire une per­sonne que l’on doit res­pec­ter et pren­dre en compte, et non une simple chose (organe, patho­lo­gie) dont on peut dis­po­ser. De part sa vision glo­bale et ses capa­ci­tés rela­tion­nel­les, elle permet au malade de conser­ver son huma­nité.

Le Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI CFE-CGC estime que face à la dérive tech­ni­cienne, et à la ten­ta­tion de tout stan­dar­di­ser par des pro­to­co­les et des normes, l’infir­mière est là pour garan­tir la per­son­na­li­sa­tion des soins, sa com­pé­tence et sa faculté de juge­ment débou­chant sur une meilleure qua­lité des soins. Pour ne pas perdre le sens de ses actes, l’infir­mière déve­loppe une réflexion de plus en plus vigi­lante sur la tech­ni­que, qui doit rester un ins­tru­ment de l’action.

Le site du SNPI CFE-CGC : http://www.syn­di­cat-infir­mier.com

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