Pétition contre le coût des traitements de cancérologie
15 mars 2016
Soutenez l’appel de 110 grands cancérologues contre les marges injustifiées des industriels, en signant la pétition "Maitriser les prix des médicaments contre le cancer : une urgence sanitaire et économique"
Les Anglais ont décidé de ne plus rembourser des traitements disponibles jugés trop coûteux par rapport à leur efficacité. C’est pour éviter d’en arriver là que les 110 principaux cancérologues ont publié un appel dans le Figaro pour demander « un système d’arbitrage des prix plus démocratique et plus transparent, en y associant de façon structurelle des représentants des patients et des professionnels ». En France, les négociations de prix se font dans la plus parfaite opacité.
http://bit.ly/1nKAcrp
De nombreuses innovations thérapeutiques apparaissent dans le domaine du cancer. Certaines offrent aux malades des espoirs de survie plus longue, et d’une meilleure qualité de vie. Pourtant, le coût d’abord croissant et maintenant exorbitant de ces innovations risque fort de compromettre ces espoirs.
A travers des pétitions et des articles, des médecins américains spécialistes du cancer ont exprimé leurs inquiétudes devant les prix de ces innovations, s’émouvant de les voir passer de 10 000 à plus de 120 000 dollars par patient et par an, en une quinzaine d’années. De fait, des dizaines de millions d’Américains qui ne bénéficient ni d’une aide de l’Etat ni d’une assurance santé personnelle, ne peuvent déjà plus profiter de ces progrès thérapeutiques. Quant à ceux qui sont pourtant détenteurs d’une assurance santé, ils peuvent néanmoins avoir à s’acquitter d’un « reste à charge » de 25 000 à 30 000 dollars par an, soit la moitié du revenu moyen des ménages aux Etats-Unis.
Le régime de santé solidaire dont nous bénéficions en France met pour l’instant les patients à l’abri. Mais pour combien de temps ? Et jusqu’à quel niveau d’inflation des prix ?
Longtemps, l’industrie pharmaceutique a calculé le prix d’un médicament en fonction de l’investissement qu’elle avait consacré à la recherche et au développement (R&D) de celui-ci. Or, aujourd’hui, de façon paradoxale, les prix des nouveaux produits explosent alors que le coût de leur R&D a diminué. En effet, alors que les anciens traitements du cancer étaient souvent issus de longs et difficiles screening plus ou moins systématiques, les nouvelles molécules commercialisées par les industriels visent des cibles définies a priori, et le plus souvent fournies par la recherche publique. Par ailleurs ces nouveaux traitements bénéficient d’Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) très rapides, donc leur temps de développement est beaucoup plus court qu’auparavant. Ainsi, la charge de la R&D ne suffit pas à justifier les prix très élevés de ces nouveaux traitements. D’ailleurs, les comptes de l’industrie pharmaceutique eux-mêmes confirment cette faible charge, où en moyenne 15% du chiffre d’affaire de la branche est allouée à la R&D contre plus de 25 % pour les dépenses de marketing, et des marges bénéficiaires annoncées excédant 15%.
Mais, se défend l’industrie pharmaceutique, ces prix sont à la hauteur de l’efficacité des traitements et de l’amélioration des services rendus, un investissement pour de moindres dépenses, en quelque sorte. Outre que beaucoup de ces innovations ne présentent pas un bénéfice qui justifie de telles assertions, on peut se demander si, même quand l’efficacité est majeure, cela autorise en soi de tels excès. Le prix des antituberculeux apparus au milieu du XXème siècle n’a heureusement pas été défini en fonction des années de sanatorium et des morts évitées…
En réalité, les prix des nouveaux traitements du cancer sont déterminés par l’idée que les industriels se font de ce que les marchés sont capables de supporter. Cela explique les écarts de prix très importants observés d’un pays à l’autre et permet également de comprendre pourquoi l’Imatinib (Glivec®), traitant de façon très efficace la Leucémie Myéloïde Chronique a vu son prix passer aux Etats-Unis en 15 ans de 30 000 à 90 000 dollars par an, sans que le service médical rendu ait été amélioré.
Au Royaume-Uni des traitements pourtant efficaces sont aujourd’hui déremboursés à cause des dépenses qu’ils engendrent.
Face à l’inflation des prix pratiqués par des laboratoires pharmaceutiques enclins à optimiser leurs gains, des menaces réelles pèsent sur l’équité d’accès des patients aux traitements innovants des cancers, comme sur la pérennité de notre système de santé solidaire, d’autant que cette inflation déborde maintenant largement le champ du cancer et touche d’autres médicaments innovants comme ceux de l’hépatite C.
Ces menaces sont suffisamment graves pour que les professionnels de santé ainsi que les patients et leurs familles manifestent leur préoccupation extrême auprès des pouvoirs publics et proposent notamment :
– de définir un juste prix pour les médicaments du cancer, basé sur les sommes investies par les industriels pour la R&D du produit (en tenant compte des apports fournis par la recherche académique) auquel s’ajouterait un retour sur investissement raisonnable, éventuellement défini a priori,
– de rendre le système d’arbitrage des prix plus démocratique et transparent, en y associant de façon structurelle des représentants des patients et des professionnels,
– de ne plus accepter les extensions de durée des brevets que la rapidité du développement des nouvelles thérapeutiques ne justifie pas,
– d’autoriser, comme cela existe déjà pour les traitements du SIDA et des infections opportunistes, l’utilisation de licences obligatoires pour les pays en développement, qui leur permettent la production et l’utilisation de génériques avant même que les brevets ne tombent dans le domaine public.
Pour signer la pétition "Maitriser les prix des médicaments contre le cancer : une urgence sanitaire et économique", cliquez sur https://www.change.org/p/pouvoirs-publics-maitriser-les-prix-des-m%C3%A9dicaments-contre-le-cancer-une-urgence-sanitaire-et-%C3%A9conomique