Qualité et la sécurité des soins à l’hôpital : grande enquête de l’Ordre Infirmier

11 avril 2012

L’Ordre des Infirmiers publie les premiers résultats d’une grande enquête nationale sur la 1ère profession de santé en France.

Plus de 21 000 infir­miè­res et infir­miers ont par­ti­cipé (sala­riés du sec­teur public, privé, libé­raux et étudiants) à la plus grande enquête jamais réa­li­sée pour la pro­fes­sion la mieux reconnue des fran­çais (2).

Démarrée le 8 mars 2012, les infir­miers qui repré­sen­tent près de 2% de la popu­la­tion active fran­çaise(3) ont été inter­ro­gés notam­ment sur la sécu­rité des soins à l’hôpi­tal, les réfor­mes réa­li­sées ces der­niè­res années et leurs pro­po­si­tions d’évolutions.

Près d’un infir­mier sur deux estime ne pas pou­voir assu­rer une sécu­rité des soins opti­male à ses patients au regard de ses condi­tions d’exer­cice

L’enquête montre que 51% des infir­miers sala­riés du public jugent ne pas pou­voir assu­rer cette sécu­rité des soins, pour 41% des infir­miers sala­riés du privé. Les résul­tats res­tent sen­si­ble­ment iden­ti­ques qu’il s’agisse de jeunes diplô­més (moins de 2 ans), d’infir­miers expé­ri­men­tés (-10 ans) ou très expé­ri­men­tés (+10 ans). Les cadres de santé (42%) et direc­teurs de soins (40%) confir­ment également ne pas pou­voir assu­rer une qua­lité et une sécu­rité des soins opti­male à leurs patients.

En revan­che les infir­miers libé­raux, exer­çant prin­ci­pa­le­ment au domi­cile de leurs patients, sont 18% à esti­mer ne pas pou­voir assu­rer une sécu­rité des soins opti­male à leurs patients au regard de leurs condi­tions d’exer­cice.

Un manque de qua­lité et de sécu­rité des soins direc­te­ment cor­rélé à des condi­tions de tra­vail dif­fi­ci­les

A la ques­tion « pour­quoi esti­mez-vous ne pas garan­tir une qua­lité et une sécu­rité des soins opti­male à vos patients ? » les infir­miers répon­dent là encore à l’unis­son :
- Surcharge de tra­vail (« trop de patients, manque d’effec­tif carac­té­risé, lour­deurs des tâches admi­nis­tra­ti­ves »)
- Stress, épuisement (« alter­nan­ces nuits/jours, pres­sion de la ren­ta­bi­lité, turn-over impor­tant, dif­fi­culté de trou­ver des rem­pla­çants y com­pris en libé­ral »)
- Manque de maté­riel ou moyens ina­dap­tés

Une pro­fes­sion homo­gène avec les mêmes prio­ri­tés quels que soient les modes d’exer­cice

Dans un clas­se­ment par ordre d’impor­tance com­pre­nant 5 pro­po­si­tions :
- la qua­lité et sécu­rité des soins
- les condi­tions de tra­vail (nombre de patients, horai­res de tra­vail, maté­riel etc.)
- la rému­né­ra­tion
- les pers­pec­ti­ves d’évolution de car­rière
- et la sécu­rité d’emploi

Les infir­miers choi­sis­sent très majo­ri­tai­re­ment les mêmes prio­ri­tés.

Qu’ils soient spé­cia­li­sés ou non, 40% des sala­riés du public, 46% du privé, 41% des libé­raux mais aussi 38% des étudiants et 36% des cadres de santé pla­cent en prio­rité abso­lue dans leur car­rière les condi­tions de tra­vail. Les Directeurs de Soins pri­vi­lé­gient en 1ère posi­tion la qua­lité et sécu­rité des soins (39%) et pla­cent les condi­tions de tra­vail en 2nde posi­tion, avant la rému­né­ra­tion (3ème).

L’ensem­ble des caté­go­ries citées ci-dessus (à l’excep­tion des Directeurs des Soins), pla­cent en seconde prio­rité la qua­lité et sécu­rité des soins, et clas­sent en 3ème prio­rité la rému­né­ra­tion.

L’ensem­ble des infir­miè­res et infir­miers jugent plutôt néga­ti­ve­ment le bilan des réfor­mes réa­li­sées

Les infir­miers se mon­trent cri­ti­ques envers les réfor­mes réa­li­sées ces der­niè­res années.
- Si plus de 55% des pra­ti­ciens inter­ro­gés se décla­rent satis­faits de l’acces­sion au grade uni­ver­si­taire licence(4), plus de 30% jugent la réforme du contenu des études « ratée », et 30% l’esti­ment « satis­fai­sante mais à amé­lio­rer ». Seuls 2% des infir­miers pen­sent que la nou­velle réforme est très satis­fai­sante.
- Les infir­miers jugent encore plus sévè­re­ment la mesure sur les coo­pé­ra­tions entre pro­fes­sion­nels de santé(5). 46% des Directeurs de soins et 65% à 70% de toutes les autres caté­go­ries d’infir­miers ne sont pas favo­ra­bles à cet arti­cle de loi per­met­tant un trans­fert de tâches médi­ca­les aux infir­miers sans aucune reconnais­sance finan­cière, sta­tu­taire ou uni­ver­si­taire.
- Enfin la quasi-tota­lité des infir­miers inter­ro­gés (95%) sou­haite également une reconnais­sance offi­cielle de la péni­bi­lité du tra­vail d’infir­mier (notion abro­gée par le Ministère notam­ment pour les sala­riés du sec­teur public lors de leur pas­sage en caté­go­rie A).

Les infir­miers pré­co­ni­sent la mas­te­ri­sa­tion et pro­po­sent des évolutions concrè­tes de leur métier afin d’amé­lio­rer la prise en charge des patients

- Si les infir­miers cri­ti­quent sévè­re­ment les coo­pé­ra­tions entre pro­fes­sion­nels de santé, ils jugent cepen­dant à plus de 80% néces­saire de créer de nou­vel­les spé­cia­li­tés infir­miè­res (mas­ters) : santé au tra­vail, psy­chia­trie, néphro-dia­lyse, etc. Cette recom­man­da­tion est cohé­rente avec l’évolution des pro­grès de la méde­cine et les retards pris par la France au regard de ses voi­sins euro­péens et nord amé­ri­cains.
- 75% des infir­miers inter­ro­gés approu­vent la récente obli­ga­tion de mettre à jour leurs connais­san­ces cli­ni­ques chaque année(6), mais plus de la moitié des pra­ti­ciens, y com­pris les Directeurs des Soins et cadres de santé, consi­dè­rent que cette mesure sera dif­fi­cile à faire res­pec­ter en raison de la pénu­rie de per­son­nel et de la sur­charge de tra­vail en résul­tant.
- La pres­crip­tion infir­mière, notam­ment dans le cadre d’une meilleure prise en charge de la dou­leur pour les patients, est également très reven­di­quée par les 520 000 infir­miers tout comme le déve­lop­pe­ment géné­ra­lisé de la pres­crip­tion infir­mière

Des pers­pec­ti­ves d’avenir en ina­dé­qua­tion avec les défis démo­gra­phi­ques et les enjeux de santé publi­que

L’enquête à laquelle plus de 21 000 infir­miers ont répondu indi­que signi­fi­ca­ti­ve­ment, depuis le jeune pro­fes­sion­nel diplômé au Directeur des Soins, que la pro­fes­sion infir­mière sou­haite très majo­ri­tai­re­ment une évolution rapide de son champ et de ses condi­tions d’exer­cice.

Le déve­lop­pe­ment des mas­ters de spé­cia­li­tés et de la pres­crip­tion infir­mière sont des solu­tions pré­co­ni­sées par une pro­fes­sion pré­sente à tous les échelons opé­ra­tion­nels du sys­tème de santé.

L’Ordre National des Infirmiers appelle les can­di­dats et le gou­ver­ne­ment à pren­dre rapi­de­ment des enga­ge­ments concrets auprès des orga­ni­sa­tions repré­sen­ta­ti­ves infir­miè­res (asso­cia­tions, syn­di­cats et Ordre) afin d’assu­rer à la popu­la­tion une qua­lité et une sécu­rité des soins opti­male.

- (1) Source DREES 2010
- (2) 99% d’opi­nion favo­ra­ble, enquête réa­li­sée par l’Ifop pour France-Soir en 2011
- (3) Source INSEE 2010 popu­la­tion active chez les 15 ans ou plus
- (4) Circulaire inter­mi­nis­té­rielle du 26 juin 2009
- (5) Article 51 de la Loi HPST
- (6) Décret n° 2011-2114 du 30 décem­bre 2011 rela­tif au déve­lop­pe­ment pro­fes­sion­nel continu des pro­fes­sion­nels de santé para­mé­di­caux

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