SNIIL : A quand la mise sous tutelle des IDEL ?

26 janvier 2015
Communiqué du 22.01.15 du SNIIL, syndicat des infirmières libérales
Titulaires au minimum d’un niveau d’étude de grade licence, les infirmières libérales ne seraient-elles que des décérébrées incapables d’avoir la moindre idée sur le devenir de leur propre métier et, à fortiori, sur l’évolution des politiques de santé publique ? C’est, en tout cas, la question que l’on peut se poser à la lecture de la dernière étude de l’Observatoire Régional de Santé (ORS) Pays de la Loire, réalisée en partenariat avec le Ministère de la Santé et la DREES[i]. En effet, au sein de cette enquête, c’est bien, de nouveau, à des médecins que l’on demande de se prononcer sur l’avenir de la profession infirmière… alors que jamais encore on ne l’a demandé aux infirmières elles-mêmes !
Sensée avoir pour sujet la « coopération entre professionnels de santé », l’étude de l’ORS propose ainsi aux médecins de dire s’ils sont, ou non, favorables au rattachement au cabinet médical d’une infirmière « rémunérée par un forfait de l’Assurance Maladie ».
Transformée, sans qu’on ne lui ait rien demandé en tâcheronne corvéable à merci et payée par la Sécu, l’infirmière voit alors son travail imposé par les médecins via des « délégations de tâches ». Parmi elles : la « surveillance de la tension artérielle », « l’éducation thérapeutique du patient diabétique ou asthmatique » ou encore « l’éducation nutritionnelle »… Et tout ira ainsi très bien dans le meilleur des mondes puisque le temps gagné par les médecins permettra, pour 40% d’entre eux, de profiter davantage de leur vie privée[ii]…
Demandant aux médecins de disposer sans aucune vergogne de la vie des infirmières, l’étude de l’ORS ne fait pas scandale. Et ce, même, si elle repose sur une hypothèse erronée puisque tous les actes cités pour être délégués aux infirmières font déjà partie intégrante de leur rôle propre. Autrement dit, les libérales n’ont pas besoin d’une « délégation de tâches » pour pouvoir, déjà, les pratiquer en toute autonomie...
Pire même ! Cette étude est dans la norme de ce qui se passe actuellement… illustrant parfaitement l’attitude des pouvoirs et institutions publics : un mépris récurrent et une forte méconnaissance de la profession infirmière, notamment libérale. Car n’oublions pas que :
le Ministère n’accorde des entretiens au sujet de la prochaine loi de Santé qu’aux syndicats de médecins généralistes… et ce bien qu’un pan entier de l’activité infirmière libérale, celle de la vaccination, pourrait être confié aux pharmaciens
le groupe de travail chargé d’élaborer le référentiel du métier d’infirmière en pratiques avancées au sein du Ministère de la Santé n’est pas piloté par une infirmière… mais par un membre de la Direction Générale de l’Offre de Soins et un médecin généraliste
depuis 2012, le Ministère de la Santé a commandé sept études sur la profession de médecin généraliste à la DREES, contre deux seulement pour les dentistes, une pour les sages-femmes et les métiers de la rééducation… et zéro pour les infirmières. Ce qui a pour conséquence immédiate une totale ignorance du métier infirmier.
Révolté par tant de dédain vis-à-vis de professionnelles de santé qui se trouvent être non seulement les plus nombreuses de France[iii], mais aussi les plus proches des patients[iv], le Sniil, premier syndicat infirmier libéral appelle donc instamment les pouvoirs publics à choisir entre :
aller jusqu’au bout de leur logique, et placer officiellement sous tutelle toutes les infirmières libérales…
… ou avoir plus de considération et de justesse dans l’appréciation du métier infirmier libéral en mettant notamment en œuvre des études sérieuses sur la profession.
Et ainsi pourra-t-on, peut-être corriger un déséquilibre flagrant expliquant, sans doute, la politique stérile du « tout-médecin » suivie actuellement en France…
[i]« Intégration d’infirmiers au sein de cabinets de médecine générale : l’opinion des médecins généralistes des Pays de la Loire » in Panel en Médecine générale n°10, décembre 2014.
[ii]Selon l’étude ORS-Ministère-DREES Le temps médical « gagné » par ces « délégations de tâche » serait réinvesti, pour 40% des médecins interrogés, dans leur seule vie privée.
[iii]98249 infirmières libérales sont actuellement en exercice contre seulement 67432 médecins généralistes (source : DREES, chiffres 2014, métropole uniquement, répertoire Adeli ; DRESS, santé-protection sociale, 2014).
[iv]65% des visites à domicile effectuées par les infirmières libérales ont lieu dans leur commune d’exercice et 90% dans une commune se situant à moins de 15 minutes alors que seulement 56% des consultations médicales s’effectuent au sein de la commune de résidence des patients (source : « Offre de soins de premier recours : proximité ne rime pas toujours avec accessibilité », DREES, études et résultats n°817, oct. 2012).