La loi sécurisation de l’emploi enfin adoptée !
17 juin 2013
La loi portant sur la sécurisation de l’emploi a été adoptée par le Sénat le 14 mai 2013 et le conseil constitutionnel vient de la valider (décision du 13 juin 2013).
Cette loi est venue compléter les dispositions issues de l’ANI du 11 janvier 2013 sur la sécurisation de l’emploi.
Elle entend sécuriser les parcours professionnels des salariés en créant de nouveaux droits et donner aux entreprises la souplesse nécessaire pour réagir efficacement aux difficultés économiques conjoncturelles et développer l’emploi.
1- Un législateur à l’écoute des partenaires sociaux…
La CFE-CGC se félicite du point d‘équilibre trouvé entre la démocratie sociale et la démocratie politique.
De nombreuses avancées ont ainsi été consacrées par la loi ! Sans être exhaustif, certains sujets sur lesquels la CFE-CGC a été à l’origine peuvent être cités.
a) De nouveaux droits individuels, garants d’une meilleure sécurisation des parcours professionnels des salariés
la complémentaire santé pour tous, bien que certaines dispositions aient été rejetées par le conseil constitutionnel (cf. partie 2 de l’article) ;
le droit à la mobilité volontaire sécurisée, portée par la CFE-CGC, sera désormais inscrit dans le Code du travail aux articles L. 1222-12 à L. 1222-16. En résumé, conformément aux propositions de la CFE-CGC, un salarié d’une entreprise de plus de 300 salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté, pourra, grâce à ce nouveau droit, bénéficié, à son initiative et avec l’accord de son employeur, d’une « période de mobilité » lui permettant de découvrir un emploi dans une autre entreprise. Son retour est également garanti et encadré, grâce aux revendications de la CFE-CGC, par l’avenant au contrat de travail mettant en place cette mobilité ;
le compte personnel de formation, véritable révolution en matière de formation ! Inséré à l’article L. 6111-1 et suivants du Code du travail, ce compte a pour vocation de favoriser l’accès à la formation professionnelle tout au long de la vie. Chaque personne disposera ainsi, indépendamment de son statut, dès son entrée sur le marché du travail, d’un compte personnel de formation, individuel et intégralement transférable en cas de changement ou de perte d’emploi. Une concertation a débuté le 21 mai entre les partenaires sociaux et les pouvoirs publics. Celle-ci permettra d’établir une feuille de route en vue de la négociation qui portera notamment sur la mise en place de ce nouveau dispositif, qui débutera au mois de septembre et devrait se terminer d’ici la fin de l’année.
b) De nouveaux droits collectifs en faveur de la sécurisation des parcours, un premier pas vers un dialogue social plus mature
La mise en place de la base de données telle que prévue dans l’ANI du 11 janvier, véritable révolution en matière de dialogue social, a pour but de favoriser un dialogue à froid permettant aux organisations syndicales et aux élus dans l’entreprise d’avoir des informations bien en amont. Ce dispositif, clé de voûte de l’ANI et de la loi sécurisation de l’emploi, aidera à fluidifier les échanges entre toutes les parties prenantes dans l’entreprise et permettra de construire des projets de manière sereine et transparente, si tous les acteurs jouent le jeu !
La reprise par la loi de la mise en place des administrateurs salariés, revendication phare de la CFE-CGC, nous satisfait dans sa philosophie. En effet, en matière de mode de désignation, la CFE-CGC a toujours prôné lors de la transposition législative, ainsi que dans l’ANI, un mode de désignation électif (avec deux collèges), comme cela se pratique aujourd’hui en matière d’élection professionnelle. Malheureusement, le législateur n’en a fait qu’une option.
Enfin, plus généralement, nous pouvons noter que les partenaires sociaux ont d’ores et déjà signé un avenant à la convention d’assurance chômage, en date du 29 mai 2013, qui a acté la mise en œuvre des taux de surcotisation fixés par l’ANI, qui doivent s’appliquer dès le 1er juillet 2013.
2- … toujours autonome dans l’élaboration de la loi
Bien qu’il ait respecté dans l’ensemble la philosophie de l’ANI, le législateur a tenu à apporter quelques modifications au texte lors de la transcription législative qui bien souvent améliorent l’accord.
Le retour des clauses de désignation
Tout d’abord, concernant la généralisation de la complémentaire santé, le législateur accède à la demande portée notamment par la CFE-CGC de voir rétablir les clauses de désignations. Pour rappel, l’ANI du 11 janvier 2013 ne contenait aucune référence à la possibilité pour les partenaires sociaux de la branche de « recommander » un organisme assureur.
Suite à un long débat sur cette question, les parlementaires de l’Assemblée nationale dans leur majorité, conscients de la nécessité de préserver l’intérêt général des salariés relayée par la CFE-CGC notamment, ont réintroduit les clauses de désignation dans le texte. Les clauses de désignation sont ainsi préservées pour le moment. Ce débat était loin d’être anodin !
En effet, seul le mécanisme de la désignation, qui oblige l’organisme d’assurance désigné à aller chercher toutes les entreprises de la branche pour mettre en œuvre le régime, permet d’arriver à une couverture certaine, rapide et massive de l’ensemble des salariés de la branche.
Ce mécanisme a permis aux partenaires sociaux de couvrir plus de 13 millions de salariés en prévoyance et plus récemment 3,5 millions de salarié en santé. La protection sociale complémentaire en prévoyance et en santé par accord de branches avec désignation constitue le moyen le plus efficace et au moindre coût après la sécurité sociale.
La décision du conseil constitutionnel n’invalide pas l’ensemble de ces
points : le conseil reconnaît la possibilité, dans un but de mutualisation des risques, de recommander au niveau de la branche un seul organisme de prévoyance proposant un contrat de référence ou de désigner au niveau de la branche plusieurs organismes de prévoyance proposant au moins de tels contrats de référence. En revanche, il invalide la migration obligatoire pour les entreprises qui ont un autre contrat en vigueur, ce qui affaiblit fortement le dispositif. Enfin, il jette le trouble sur la possibilité aux négociateurs de branche de définir une couverture uniformisée à un prix mutualisé auprès d’un prestataire unique.
La modification du motif de rupture en cas de refus du salarié dans le cadre de la mobilité interne
L’ANI du 11 janvier 2013 a créé, pour les entreprises, un nouveau dispositif de mobilité interne via un accord collectif d’entreprise.
La loi vient modifier ce dispositif.
Dorénavant, un salarié qui refuse de se voir appliquer cet accord de mobilité pourra voir son contrat de travail rompu pour licenciement individuel pour motif économique et non plus personnel. Cette modification de l’ANI est importante car le salarié pourra alors bénéficier notamment de l’accompagnement renforcé du contrat de sécurisation professionnelle (un accompagnement de 12 mois et une indemnisation correspondant à 80% de son salaire brut).
L’élargissement du rôle de l’administration dans la procédure de licenciement économique
Le législateur a également entendu renforcer le rôle de l’administration lors de licenciements collectifs pour motif économique. Désormais, lors de la mise en place d’un plan de sauvegarde pour l’emploi (PSE) la loi prévoit une intervention de l’administration :
En cas de PSE négocié par accord collectif majoritaire, il est prévu une validation par l’administration .
En cas de mise en place du PSE de manière unilatérale par l’employeur, il est prévu une homologation par l’administration.
En outre, la loi crée un pouvoir d’injonction de la part de l’administration. Le comité d’entreprise, ou, à défaut, les délégués du personnel, et les organisations syndicales représentatives en cas de négociation d’un accord majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l’emploi, auront la possibilité de demander à l’administration de faire usage de son pouvoir d’injonction à l’entreprise afin que celle-ci fournisse les informations manquantes. La demande devra être motivée et pertinente.
Ce pouvoir d’injonction n’était pas prévu par l’ANI. Lors du débat parlementaire sur la transposition de l’accord dans la loi, la CFE-CGC ne s’est pas opposée sur ce point. Faire de l’administration un médiateur lors de la négociation du PSE peut être la garantie d’un dialogue sociale de qualité sur cette question délicate que sont les licenciements collectifs pour motif économique.