Maltraitance chez l’enfant : repérage et conduite à tenir (HAS)

7 octobre 2017
Fiche mémo de la HAS (2017)
La difficulté et la complexité des situations, ainsi que le fort sentiment d’isolement du professionnel, ont amené la HAS (Haute Autorité de Santé) à mettre à la disposition des professionnels des informations claires et précises pour les aider dans le repérage des violences chez l’enfant.
La maltraitance est définie par le non-respect des droits et des besoins fondamentaux des enfants (santé ; sécurité ; moralité ; éducation ; développement physique, affectif, intellectuel et social) (cf. article 375 du Code civil, annexe 1.1). La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance a remplacé la notion de maltraitance par celle de danger (qui inclut la maltraitance).
Plus de 80 % des mauvais traitements sont infligés au sein de la famille. La maltraitance est caractérisée par son début précoce et sa chronicité.
La fiche HAS se présente en trois parties :
le repérage de la maltraitance et les décisions qui lui font suite ;
les documents déjà élaborés par la HAS relatifs à trois situations particulières : la mort inattendue du nourrisson, le syndrome du bébé secoué, les maltraitances sexuelles intrafamiliales ;
des annexes, comme les aspects législatifs et réglementaires, et le modèle de signalement établi par l’ordre des médecins, le ministère de la Justice, le ministère de la Santé et de la Famille et les associations de protection de l’enfance.
Que rechercher et comment ?
Il s’agit de réaliser un examen clinique complet de l’enfant dévêtu comprenant :
la mesure des paramètres de croissance (périmètre crânien, taille, poids) et leur report sur les courbes ;
l’évaluation de son développement psychomoteur et de ses capacités ;
un examen cutané rigoureux, à la recherche de traces de violence sur l’ensemble du corps ;
un examen des muqueuses notamment de la cavité buccale à la recherche de lésions dentaires et muqueuses ;
une palpation généralisée à la recherche de signes de fractures, d’hémorragie interne par atteinte viscérale (défense abdominale, douleur, masse…) ;
une observation du comportement de l’enfant et de son entourage durant l’examen clinique. Au cours de l’entretien avec l’entourage de l’enfant
Il est recommandé de s’entretenir avec la famille ou l’entourage, en posant des questions ouvertes, sans porter de jugement. L’objectif est de recueillir des informations concernant :
les antécédents médicaux personnels et familiaux ;
les événements de vie qui ont pu affecter l’enfant ;
le comportement habituel de l’enfant, l’environnement dans lequel il vit ;
l’environnement familial (nombre d’enfants, y compris les ½ frères et sœurs ; stabilité du couple, règles éducatives ; conflits ; violences conjugales ; antécédents de maltraitance dans l’enfance des parents) ;
la relation parent-enfant (favorable, hostile ou indifférente).
Lors de l’entretien, il faut garder à l’esprit que l’accompagnateur (parent ou adulte de l’entourage) peut être l’auteur présumé ou un témoin passif.
Il est recommandé d’avoir un entretien seul avec l’enfant dès que son âge le permet et avec son accord, et de :
débuter l’entretien par des questions d’ordre général (relatives à l’école, à ses conditions de vie à la maison, ses loisirs, ses relations avec sa famille, ses copains) ;
laisser l’enfant s’exprimer spontanément, en évitant de reformuler ou d’interpréter ses propos, en respectant les silences et en privilégiant les questions ouvertes, en lui montrant qu’on croit sa parole.
L’objectif est de préciser l’origine des lésions observées, de rechercher d’éventuelle discordances entre les lésions observées et les explications données.
Notes dans le dossier du patient et le carnet de santé
Toutes les données recueillies au cours de l’examen clinique doivent être consignées dans le dossier du patient. Les propos de l’enfant et de la famille sont retranscrits mot pour mot, entre guillemets, tels qu’ils ont été entendus ou observés, en évitant tout commentaire, interprétation ou appréciation personnelle. Les diverses lésions peuvent être retranscrites sur un schéma. Elles devraient être, dans la mesure du possible, photographiées.
Dans le carnet de santé (outil de liaison entre les différents professionnels de santé) ne sont reportées que les données objectives relatives au développement de l’enfant et à la pathologie observée.
En situation d’urgence
En cas d’urgence vitale, appel du SAMU centre 15 pour transfert de l’enfant à l’hôpital qui doit faire le signalement.
En cas de danger important, nécessité de mise à l’abri immédiate de l’enfant (forte suspicion de maltraitance avec auteur présumé au domicile de l’enfant), il faut :
hospitaliser sans délai : prévenir le senior des urgences et s’assurer de la venue effective de l’enfant ;
informer le procureur de la République par téléphone et adresser le signalement par fax et courrier en gardant une copie (annexe 2). Le signalement est réalisé, après concertation, soit par le médecin qui adresse l’enfant, soit par l’hôpital.
En dehors des situations d’urgence
Compte tenu de la complexité des situations d’enfants en danger et en risque de danger, les réflexions doivent se faire de façon collégiale avec notamment le médecin scolaire et/ou le médecin de PMI.
Ces situations relèvent de la compétence du conseil général et doivent faire l’objet d’une « information préoccupante » transmise à la cellule départementale de recueil d’évaluation, et de traitement des informations préoccupantes (CRIP) par téléphone et fax et/ou courrier. La CRIP a également un rôle de conseil pour les professionnels lorsqu’ils sont dans le questionnement et le doute à propos de la situation d’un enfant.
Quel que soit le degré d’urgence, informer les parents de ses inquiétudes par rapport à l’enfant sauf si cela est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant.
L’article 226-14 du code pénal permet la révélation d’une information à caractère secret : « À celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;"
Un modèle de signalement a été élaboré en concertation entre le ministère de la Justice, le ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées, le ministère délégué à la Famille, le conseil national de l’ordre des médecins et les associations de protection de l’enfance.
Fiche mémo HAS : https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2014-11/fiche_memo_maltraitance_enfant.pdf