Missions infirmières suite à la loi infirmière de juin 2025

8 juin 2025

Le 10 juin 2025, l’Assemblée natio­nale a adopté à l’una­ni­mité la ver­sion finale de la pro­po­si­tion de loi, après accord trouvé en com­mis­sion mixte pari­taire le 3 juin. Le Sénat votera défi­ni­ti­ve­ment le texte le 19 juin pro­chain. La pro­po­si­tion de loi reconnaît les consul­ta­tions et le diag­nos­tic infir­miers, et la pres­crip­tion auto­nome de cer­tains pro­duits et exa­mens.

La pro­po­si­tion de loi redé­fi­nit le rôle des infir­miers, en pré­ci­sant dans le code de la santé publi­que plu­sieurs de leurs mis­sions-socles :
 dis­pen­ser des soins infir­miers "pré­ven­tifs, cura­tifs, pal­lia­tifs, rela­tion­nels ou des­ti­nés à la sur­veillance cli­ni­que" et les évaluer ;
 contri­buer à la conci­lia­tion médi­ca­men­teuse aux côtés des autres pro­fes­sion­nels de santé (pro­ces­sus per­met­tant d’iden­ti­fier et d’har­mo­ni­ser tous les trai­te­ments en cours ou à venir, en asso­ciant le patient et en favo­ri­sant la com­mu­ni­ca­tion entre pro­fes­sion­nels) ;
 contri­buer à orien­ter les patients et à coor­don­ner leur par­cours de santé ;
 par­ti­ci­per aux soins de pre­mier recours, à la pré­ven­tion, aux actions de dépis­tage, à l’éducation à la santé... ;
 concou­rir à la for­ma­tion des étudiants et de leurs pairs ;
 pren­dre part à la recher­che, notam­ment en scien­ces infir­miè­res.

Les domai­nes d’acti­vi­tés, les actes et les soins réa­li­sa­bles par les infir­miers seront fixés par un décret et un arrêté.

Le texte reconnaît sur­tout le rôle propre de l’infir­mier. Il reconnait dans la loi les consul­ta­tions infir­miè­res (qui exis­tent déjà dans les établissements de santé) et le diag­nos­tic infir­mier (qui était déjà dans le décret d’exer­cice depuis 1993). La consul­ta­tion infir­mière n’a pas voca­tion à concur­ren­cer la consul­ta­tion médi­cale. Elle por­tera sur des péri­mè­tres rele­vant du rôle propre de l’infir­mier, par exem­ple le trai­te­ment des plaies sim­ples.

La pro­fes­sion se voit de même accor­der un pou­voir de pres­crip­tion auto­nome et géné­ral sur les pro­duits et exa­mens com­plé­men­tai­res néces­sai­res aux soins infir­miers. Jusqu’à pré­sent, chaque nou­veau droit de pres­crip­tion devait être ins­crit dans la loi (comme les vac­ci­na­tions, les sub­sti­tuts nico­ti­ni­ques, les pro­duits médi­caux voir https://syn­di­cat-infir­mier.com/Que-peut-pres­crire-un-infir­mier-en-2025.html ). La liste des pro­duits et exa­mens sera défi­nie par arrêté minis­té­riel.

En outre, la pro­mul­ga­tion de la loi devra conduire à l’ouver­ture d’une négo­cia­tion sur la rému­né­ra­tion des infir­miers. Elle devra pren­dre en compte la péni­bi­lité du métier.

Enfin, le texte reconnait :
 les infir­miers de l’éducation natio­nale et de l’ensei­gne­ment supé­rieur, comme "une spé­cia­lité infir­mière auto­nome pou­vant être sanc­tion­née par un diplôme de niveau 7"
 le statut d’infir­mier coor­don­na­teur en Ehpad ("un infir­mier coor­don­na­teur exer­çant en col­la­bo­ra­tion avec le méde­cin coor­don­na­teur et en lien avec l’enca­dre­ment admi­nis­tra­tif et soi­gnant de l’établissement")

Expérimentation d’un accès direct aux infir­miers

Le texte pré­voit une expé­ri­men­ta­tion pour trois ans. Dans cinq dépar­te­ments, l’État pourra auto­ri­ser un accès direct aux infir­miers en établissement ou, en ville, dans le cadre de struc­tu­res d’exer­cice coor­donné (hôpi­taux, établissements médico-sociaux, mai­sons ou cen­tres de santé...).

Cet accès direct per­met­tra aux patients de consul­ter direc­te­ment, sans passer par un méde­cin, un infir­mier et d’obte­nir le rem­bour­se­ment des soins par l’assu­rance mala­die. Un compte rendu devra être adressé au méde­cin trai­tant et reporté dans le dos­sier médi­cal par­tagé.

Évolution des IPA

Le texte permet de faci­li­ter l’évolution des infir­miers en pra­ti­que avan­cée (IPA), qui dis­po­sent de com­pé­ten­ces élargies par rap­port aux infir­miers clas­si­ques (conduite d’entre­tiens, réa­li­sa­tion d’exa­mens cli­ni­ques ou encore pres­crip­tion de cer­tains médi­ca­ments). Les IPA pour­ront désor­mais exer­cer dans de nou­veaux sec­teurs : dans les ser­vi­ces de pro­tec­tion mater­nelle et infan­tile (PMI), de santé sco­laire, d’aide sociale à l’enfance (ASE) ou d’accueil du jeune enfant. De plus, les infir­miers de spé­cia­lité (anes­thé­sie, bloc opé­ra­toire, pué­ri­culture) pour­ront exer­cer en pra­ti­que avan­cée, tout en conser­vant leur spé­cia­lité.

"Cette loi va enfin per­met­tre aux infir­miers d’exer­cer plei­ne­ment leurs com­pé­ten­ces pour flui­di­fier le par­cours de soins des patients. Une régle­men­ta­tion obso­lète [une loi de 1978 et un décret de 2004] entraî­nait un déca­lage entre ce que nous sommes, et ce que l’on nous auto­ri­sait à faire, aux dépens des patients. Merci au minis­tre et aux par­le­men­tai­res pour cette reconnais­sance de l’art infir­mier. Nous espé­rons main­te­nant leur sou­tien pour que les admi­nis­tra­tions cen­tra­les rédi­gent les textes régle­men­tai­res qui ren­dront effec­ti­ves ces évolutions." pré­cise Thierry Amouroux, le porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI.

Car la loi sur les ratios adop­tée en jan­vier elle aussi à l’una­ni­mité par les dépu­tés et les séna­teurs, est tou­jours blo­quée par le minis­tère. La HAS n’a tou­jours pas reçu sa lettre de sai­sine, ce qui bloque tout le pro­ces­sus. Un mépris pour la repré­sen­ta­tion natio­nale. Le déses­poir des soi­gnants qui ont 2 fois plus de patients que les normes inter­na­tio­na­les. Et sur­tout une perte de chance pour les per­son­nes hos­pi­ta­li­sées, car toutes les études inter­na­tio­na­les démon­trent le lien entre ratios et mor­ta­lité.

*******************

Voici un extrait des prin­ci­paux arti­cles du texte légis­la­tif, qui concerne les 640.000 infir­miè­res géné­ra­lis­tes :

Art. L. 4311-1. – I. – L’infir­mier exerce son acti­vité, dans le res­pect du code de déon­to­lo­gie, dans le cadre de son rôle propre ou sur pres­crip­tion et en coor­di­na­tion avec les autres pro­fes­sion­nels de santé.

« Dans l’exer­cice de sa pro­fes­sion, l’infir­mier entre­prend, réa­lise, orga­nise et évalue les soins infir­miers. Il effec­tue des consul­ta­tions infir­miè­res et pose un diag­nos­tic infir­mier. Il pres­crit les pro­duits de santé et les exa­mens com­plé­men­tai­res néces­sai­res à l’exer­cice de sa pro­fes­sion. La liste de ces pro­duits de santé et de ces exa­mens com­plé­men­tai­res est établie par un arrêté des minis­tres char­gés de la santé et de la sécu­rité sociale pris après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie natio­nale de méde­cine. Elle est mise à jour au moins tous les trois ans. Les avis men­tion­nés au pré­sent alinéa sont répu­tés émis en l’absence de réponse dans un délai de trois mois.

II. – Les mis­sions de l’infir­mier sont les sui­van­tes :

 1° Dispenser des soins infir­miers pré­ven­tifs, cura­tifs, pal­lia­tifs, rela­tion­nels ou des­ti­nés à la sur­veillance cli­ni­que, pro­cé­der à leur évaluation et contri­buer à la conci­lia­tion médi­ca­men­teuse ;

 2° Contribuer à l’orien­ta­tion de la per­sonne ainsi qu’à la coor­di­na­tion et à la mise en œuvre de son par­cours de santé ;

 2° bis Dans le cadre de son rôle propre, en accès direct, et dans le cadre de son rôle pres­crit, par­ti­ci­per aux soins de pre­mier recours défi­nis à l’arti­cle L. 1411-11 ;

 3° Participer à la pré­ven­tion, aux actions de dépis­tage, à l’éducation à la santé, à la santé au tra­vail, à la pro­mo­tion de la santé et à l’éducation thé­ra­peu­ti­que de la per­sonne et, le cas échéant, de son entou­rage ;

 4° Concourir à la for­ma­tion ini­tiale et à la for­ma­tion conti­nue des étudiants, de ses pairs et des pro­fes­sion­nels de santé placés sous sa res­pon­sa­bi­lité ;

 5° Exploiter les don­nées pro­ban­tes dans la pra­ti­que pro­fes­sion­nelle et concou­rir à la recher­che, notam­ment dans le domaine des scien­ces infir­miè­res.

« III. – L’infir­mier par­ti­cipe à la mis­sion de ser­vice public de per­ma­nence des soins dans les condi­tions fixées à l’arti­cle L. 6314-1.

« IV. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis des repré­sen­tants des pro­fes­sion­nels concer­nés, pré­cise les domai­nes d’acti­vi­tés et de com­pé­ten­ces de l’infir­mier.

« Un arrêté du minis­tre chargé de la santé fixe, pour chacun des domai­nes d’acti­vi­tés, la liste des actes et soins réa­li­sés par les infir­miers. »

II. – (Non modi­fié)

III (nou­veau). – La pro­mul­ga­tion de la pré­sente loi donne lieu à une négo­cia­tion sur la rému­né­ra­tion des infir­miers afin de tenir compte, en fonc­tion des dif­fé­rents lieux d’exer­cice, des évolutions de com­pé­ten­ces envi­sa­gées. Cette négo­cia­tion prend aussi en compte la péni­bi­lité du métier.

Article 1er bis A

Après le pre­mier alinéa du V de l’arti­cle L. 313-12 du code de l’action sociale et des famil­les, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le per­son­nel des établissements men­tion­nés aux I et IV bis peut com­pren­dre un infir­mier coor­don­na­teur exer­çant en col­la­bo­ra­tion avec le méde­cin coor­don­na­teur et en lien avec l’enca­dre­ment admi­nis­tra­tif et soi­gnant de l’établissement. Les condi­tions d’exer­cice de l’infir­mier coor­don­na­teur sont défi­nies par décret. »

Article 1er ter

Après l’arti­cle L. 4311-3 du code de la santé publi­que, il est inséré un arti­cle L. 4311-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4311-3-1. – Les infir­miers titu­lai­res d’un diplôme, d’un cer­ti­fi­cat ou d’un titre de for­ma­tion men­tionné aux arti­cles L. 4311-3 et L. 4311-4 et les infir­miers titu­lai­res du diplôme de for­ma­tion en pra­ti­que avan­cée men­tionné au II de l’arti­cle L. 4301-1 infor­ment le conseil dépar­te­men­tal de l’ordre dans le res­sort duquel se situe leur rési­dence pro­fes­sion­nelle lorsqu’ils inter­rom­pent leur acti­vité pour une durée supé­rieure à un seuil défini par décret. Ce seuil ne peut excé­der trois ans.

« Les infir­miers men­tion­nés au pre­mier alinéa du pré­sent arti­cle ayant inter­rompu leur acti­vité pen­dant plus de six ans et sou­hai­tant repren­dre leur exer­cice peu­vent pro­cé­der à une évaluation de leur com­pé­tence pro­fes­sion­nelle. Lorsque les résul­tats de l’évaluation le jus­ti­fient, l’auto­rité com­pé­tente peut pro­po­ser à l’infir­mier d’effec­tuer, avant toute reprise d’acti­vité, les mesu­res d’accom­pa­gne­ment ou de for­ma­tion qu’elle juge adap­tées.

« Un décret déter­mine les moda­li­tés d’appli­ca­tion du pré­sent arti­cle. »

Article 1er quater A

Après l’arti­cle L. 4311-4 du code de la santé publi­que, il est inséré un arti­cle L. 4311-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4311-4-1. – Les infir­miè­res et infir­miers du corps de l’éducation natio­nale et de l’ensei­gne­ment supé­rieur cons­ti­tuent une spé­cia­lité infir­mière auto­nome pou­vant être sanc­tion­née par un diplôme de niveau 7.
« À ce titre, ils exer­cent des mis­sions spé­ci­fi­ques défi­nies par leur cadre sta­tu­taire. Leur rôle, prin­ci­pa­le­ment éducatif et pré­ven­tif, s’ins­crit dans la poli­ti­que géné­rale de l’éducation natio­nale, dont l’objec­tif est de contri­buer à la réus­site de tous les élèves et étudiants.
« Les moda­li­tés d’appli­ca­tion du pré­sent arti­cle sont pré­ci­sées par décret en Conseil d’État. »

Article 1er quater

I. – À titre expé­ri­men­tal, pour une durée de trois ans et dans cinq dépar­te­ments, dont un dépar­te­ment régi par l’arti­cle 73 de la Constitution, dans les établissements de santé men­tion­nés à l’arti­cle L. 6111-1 du code de la santé publi­que, dans les établissements et les ser­vi­ces médico-sociaux men­tion­nés aux arti­cles L. 312-1 et L. 344-1 du code de l’action sociale et des famil­les et dans le cadre des struc­tu­res d’exer­cice coor­donné men­tion­nées aux arti­cles L. 1411-11-1, L. 6323-1 et L. 6323-3 du code de la santé publi­que, l’État peut auto­ri­ser les infir­miers à pren­dre en charge direc­te­ment les patients pour des actes ne rele­vant pas de leur rôle propre. Un compte rendu est adressé au méde­cin trai­tant et reporté dans le dos­sier médi­cal par­tagé du patient.

II. – Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie natio­nale de méde­cine, pré­cise les moda­li­tés de mise en œuvre de l’expé­ri­men­ta­tion men­tion­née au I, les dépar­te­ments rete­nus ainsi que les condi­tions d’évaluation de l’expé­ri­men­ta­tion en vue d’une éventuelle géné­ra­li­sa­tion. Les avis men­tion­nés au pré­sent II sont répu­tés émis en l’absence de réponse dans un délai de trois mois.

III. – Au plus tard six mois avant le terme de l’expé­ri­men­ta­tion, le Gouvernement remet au Parlement un rap­port d’évaluation. Ce rap­port se pro­nonce notam­ment sur la per­ti­nence d’une géné­ra­li­sa­tion.

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