Suppression du concours d’entrée en IFSI : danger sans l’entretien

Suppression du concours d'entrée en IFSI : danger sans l'entretien

5 juillet 2018

Le nou­veau dis­po­si­tif d’admis­sion en Instituts de for­ma­tion en soins infir­miers (IFSI) entrera en vigueur pour la ren­trée 2019. Désormais, plus de concours mais des vœux for­mu­lés sur Parcoursup et une admis­sion sur dos­sier.

Les études d’infir­miè­res sont de trois années depuis 1979. La for­ma­tion a tou­jours été de qua­lité, mais pour des rai­sons bas­se­ment comp­ta­bles (pas­sage des salai­res en caté­go­rie A de la fonc­tion publi­que), la reconnais­sance uni­ver­si­taire n’a pu abou­tir qu’en 2009, avec la bas­cule dans le sys­tème LMD (Licence Master Doctorat) et un "grade de Licence" pour les titu­lai­res du Diplôme d’Etat d’Infirmière, entrés en for­ma­tion depuis 2009.

Pour 2019, il est prévu une nou­velle marche dans l’uni­ver­si­ta­ri­sa­tion de la for­ma­tion infir­mière, avec le rem­pla­ce­ment du concours d’entrée en IFSI, par une bas­cule sur le logi­ciel Parcoursup uti­lisé par l’Université depuis cette année. On assiste là, à la deuxième phase de la trans­for­ma­tion de la for­ma­tion infir­mière, avec une inté­gra­tion totale dans le monde de l’uni­ver­sité. Ce rat­ta­che­ment est une reconnais­sance com­plète de nos com­pé­ten­ces. Il était temps, car de nom­breux pays ont déjà une véri­ta­ble filière uni­ver­si­taire en scien­ces infir­miè­res.

Pour autant, il est impor­tant que la for­ma­tion infir­mière reste pro­fes­sion­na­li­sante, et ne devienne éloignée des réa­li­tés. Ce qu’on ne vou­drait pas c’est qu’il arrive la même chose à notre pro­fes­sion qu’aux pro­fes­seurs des écoles, après la sup­pres­sion des écoles nor­ma­les. Les IUFM qui ont rem­placé ces écoles ont formé des pro­fes­seurs très savants, mais avec de gros­ses lacu­nes en péda­go­gie, et ça a crée des soucis dans les clas­ses. On tient à ce que la for­ma­tion reste en prise avec le ter­rain et très pro­fes­sion­na­li­sante. Il est impor­tant que les cadres for­ma­teurs infir­miers trou­vent leur juste place dans cette réforme.

Pour Thierry Amouroux, le porte parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI CFE-CGC, "Aujourd’hui la for­ma­tion est équilibrée, avec des cours magis­traux à la fac et des cours en IFSI, en petits grou­pes et donc plus per­son­na­li­sés que dans des amphis bondés. Les tra­vaux diri­gés per­met­tent de faire le lien avec le cœur de métier. Les stages per­met­tent un com­pa­gnon­nage, super­visé par un tuteur de stage."

Concernant la sup­pres­sion du concours d’entrée en IFSI : le syn­di­cat infir­mier SNPI CFE-CGC exige le main­tien de l’entre­tien comme pré­re­quis car Parcoursup ne gère que les résul­tats sco­lai­res ! Même impar­fait l’entre­tien est un pré­re­quis indis­pen­sa­ble pour détec­ter les pro­blè­mes com­por­te­men­taux ou pro­fils psy­cho­lo­gi­ques ina­dap­tés à l’exer­cice auprès des patients !

En effet, au bout de quel­ques mois, les étudiants en soins infir­miers vont en stage cli­ni­que auprès des patients, donc de per­son­nes fra­gi­li­sées. N’oublions pas que les déri­ves sec­tai­res sont en hausse dans le domaine de la santé, selon la Mission inter­­mi­­nis­­té­­rielle de vigi­­lance et de lutte contre les déri­­ves sec­­tai­­res (Miviludes) http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Derives-sec­tai­res-en-hausse-dans-le-domaine-de-la-sante.html

L’entre­tien permet de déce­ler cer­tains com­por­te­ments ou dis­cours incom­pa­ti­bles avec la pro­fes­sion. A l’inverse, les jurys ont l’expé­rience pour repé­rer cer­tai­nes pépi­tes dans le flot des can­di­dats et leur donner une chance même si le dos­sier peut être moyen. L’entre­tien est un pré­re­quis de Parcoursup dans plu­sieurs filiè­res uni­ver­si­tai­res ou tech­no­lo­gi­ques, ainsi qu’en archi­tec­ture.

Même impar­fait, l’oral permet au jury d’enten­dre les moti­va­tions du can­di­dat et d’avoir un ordre d’idée sur ses capa­ci­tés théo­ri­ques et psy­cho­lo­gi­ques à suivre la for­ma­tion et à faire ce métier. C’est utile pour évaluer les capa­ci­tés rela­tion­nel­les, les capa­ci­tés d’ana­lyse et de mise à dis­tance des pra­ti­ques.

Chaque année, les jurys d’entrée en IFSI écartent des pro­fils per­tur­bés, qu’on ne peut pas du tout mettre au contact d’un patient. Le réta­blis­se­ment de ce filtre humain nous paraît donc indis­pen­sa­ble.

Nouvelles moda­li­tés pour l’entrée en IFSI en 2019

- Formulation des vœux sur la pla­te­forme Parcoursup pour les néo-bache­liers, les étudiants en reconver­sion.
- Les aides-soi­gnants et les auxi­liai­res de pué­ri­culture conser­vent une voie d’accès spé­ci­fi­que au titre de la pro­mo­tion pro­fes­sion­nelle. 
- Admission sur dos­sier : prise en compte de l’ensem­ble des com­pé­ten­ces et valo­ri­sa­tion des par­cours, avec un objec­tif de diver­sité du recru­te­ment. En 2019, le par­cours des étudiants ayant suivi une pré­pa­ra­tion sera pris en compte et valo­risé. L’examen des dos­siers sera réa­lisé selon des pro­cé­du­res har­mo­ni­sées au niveau natio­nal, par chaque regrou­pe­ment d’IFSI. 
- Mise en place de dis­po­si­tifs d’accom­pa­gne­ment et de conso­li­da­tion des acquis, notam­ment pour des répon­ses oui-si.

Concrètement, quelle pro­cé­dure sur Parcoursup ?

- Les étudiants for­mu­lent le vœu « for­ma­tion en soins infir­miers » et des sous-vœux per­met­tant de can­di­da­ter pour tel ou tel IFSI. 
- Les IFSI, regrou­pés à partir d’un même ter­ri­toire, exa­mi­nent les dos­siers et les clas­sent sur la base des « atten­dus » défi­nis natio­na­le­ment. 
- Les étudiants reçoi­vent alors les pro­po­si­tions pour l’ensem­ble des vœux et sous-vœux qu’ils ont for­mu­lés et se pro­non­cent. 
- Les places non pour­vues peu­vent être réin­tro­dui­tes dans la pro­cé­dure com­plé­men­taire. 
- La mobi­lité géo­gra­phi­que des can­di­dats reste pos­si­ble.

Et les étudiants ins­crits en pré­pa­ra­tion IFSI en 2018-2019 ?

- Ils dépo­sent leur dos­sier sur Parcoursup début 2019. 
- L’ana­lyse des dos­siers pren­dra posi­ti­ve­ment en compte cette année sup­plé­men­taire et les com­pé­ten­ces acqui­ses. 
- Dès la ren­trée pro­chaine, les « prépas IFSI » pour­ront mettre davan­tage l’accent sur l’acqui­si­tion de com­pé­ten­ces com­plé­men­tai­res et la réflexion sur l’orien­ta­tion et moins sur la pré­pa­ra­tion tech­ni­que des épreuves.

Le dos­sier du minis­tère est en télé­char­ge­ment http://soli­da­ri­tes-sante.gouv.fr/IMG/pdf/180705_-_dp_-_uni­ver­si­ta­ri­sa­tion_des_infir­miers.pdf

Voir également :
- Suppression du concours d’entrée en IFSI : ques­tion­ne­ment des for­ma­teurs http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Suppression-du-concours-d-entree-en-IFSI-ques­tion­ne­ment-des-for­ma­teurs.html
- "La sup­pres­sion du concours infir­mier pose un pro­blème car l’oral écartait les pro­fils ina­dap­tés" https://www.sudra­dio.fr/societe/la-sup­pres­sion-du-concours-infir­mier-pose-un-pro­bleme-car-loral-ecar­tait-les-pro­fils
- Pourquoi la sup­pres­sion de l’entre­tien du concours d’infir­mier est inquié­tante https://www.chal­len­ges.fr/edu­ca­tion/pour­quoi-la-sup­pres­sion-du-concours-d-infir­mier-est-inquie­tante_599522
- Suppression du concours d’entrée en IFSI http://www.actu­soins.com/301184/sup­pres­sion-du-concours-den­tree-en-ifsi-des-heu­reux-et-des-mecontents.html

Le gou­ver­ne­ment révo­lu­tionne la for­ma­tion des infir­miers. Ils seront désor­mais recru­tés sur dos­sier à la fin de la Terminale, au lieu de passer un concours d’entrée. Pour Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat natio­nal des pro­fes­sion­nels infir­miers, cette réforme est inquié­tante pour la pro­fes­sion.

Le concours d’entrée en école d’infir­miers sera sup­primé à partir de 2019 et rem­placé par une sélec­tion sur dos­sier des can­di­dats, opérée sur la pla­te­forme Parcoursup. Les Instituts de for­ma­tions en soins infir­miers qui for­ment chaque années 31.000 élèves (pour 180.000 can­di­da­tu­res) seront désor­mais rat­ta­chés aux uni­ver­si­tés. Une réforme qui risque de lais­ser passer des étudiants inap­tes à exer­cer, selon Thierry Amouroux, porte-parole du Syndic. Explications.

Quelle est la raison d’être de cette réforme du recru­te­ment des infir­miers ? Pourquoi sup­pri­mer un concours qui mar­chait bien ?

Le projet de sup­pri­mer le concours des écoles d’infir­miers a été pensé pour inté­grer tota­le­ment ces études au monde uni­ver­si­taire. C’est une démar­che valo­ri­sante. Depuis 1979 les études d’infir­miers se font en trois ans, mais elles n’étaient pas reconnues comme des licen­ces. La pre­mière marche vers la reconnais­­sance uni­­ver­­si­­taire n’a pu abou­­tir qu’en 2009, avec la bas­­cule dans le sys­­tème LMD (Licence Master Doctorat) et un "grade de Licence" pour les titu­­lai­­res du Diplôme d’Etat d’Infirmière. On assiste là, à la deuxième phase de la trans­for­ma­tion de la pro­fes­sion, avec une inté­gra­tion totale dans le monde de l’uni­ver­sité. Les Instituts de for­ma­tions en soins infir­miers vont pro­gres­si­ve­ment dis­pa­raî­tre, et l’inté­gra­lité des cours auront lieu à la fac. Ce rat­ta­che­ment est une reconnais­sance com­plète de nos com­pé­ten­ces.

Le contenu des études va-t-il chan­ger ? Si oui dans quel sens ?

Nous ne sommes pas encore fixés mais on redoute qu’en ren­trant tota­le­ment à l’uni­ver­sité, la for­ma­tion infir­mier ne devienne éloignée des réa­li­tés. Ce qu’on ne vou­drait pas c’est qu’il arrive la même chose à notre pro­fes­sion qu’aux pro­fes­seurs des écoles, après la sup­pres­sion des écoles nor­ma­les. Les IUFM qui ont rem­placé ces écoles ont formé des pro­fes­seurs très savants, mais avec de gros­ses lacu­nes en péda­go­gie, et ça a crée des soucis dans les clas­ses. On tient à ce que la for­ma­tion reste en prise avec le ter­rain et très pro­fes­sion­na­li­sante. Les infir­miers n’ont pas voca­tion à deve­nir de petits méde­cins.

La sup­pres­sion du concours vous inquiète également. Pourquoi ?

La sup­pres­sion du concours écrit d’entrée, ce n’est pas un pro­blème. Le niveau ne bais­sera pas pour autant car la sélec­tion des dos­siers sera aussi dras­ti­que via Parcoursup. En revan­che, la sup­pres­sion de l’oral nous inquiète for­te­ment. Dans notre pro­fes­sion, l’étudiant est confronté au patient au bout de 6 mois de for­ma­tion. Et cet entre­tien de per­son­na­lité était un bon moyen de repé­rer si le can­di­dat était apte à assu­mer cette fonc­tion humaine. Chaque année, les jury écartent des pro­fils per­tur­bés, qu’on ne peut pas du tout mettre au contact d’un patient. On demande le réta­blis­se­ment de ce filtre humain, qui nous paraît indis­pen­sa­ble.

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