87% des infirmières hostiles aux coopérations de l’article 51 de la loi HPST

18 décembre 2012

L’arti­cle 51 de la loi Bachelot du 21 juillet 2009, por­tant réforme de l’hôpi­tal et rela­tive aux patients, à la santé et aux ter­ri­toi­res (loi HPST) auto­rise les « coo­pé­ra­tions entre pro­fes­sion­nels de santé », c’est-à-dire un pro­to­cole entre pro­fes­sion­nels, accepté par l’Agence Régionale de Santé, pour effec­tuer la mise en place, à titre déro­ga­toire et à l’ini­tia­tive des pro­fes­sion­nels sur le ter­rain, de trans­ferts d’actes ou d’acti­vi­tés de soins qui ne figu­rent pas dans notre décret d’actes (dit décret de com­pé­ten­ces).

Une large consul­ta­tion

Le SNPI CFE-CGC a sou­haité lancer une consul­ta­tion auprès des pro­fes­sion­nels, au tra­vers de son site inter­net. Du 29 novem­bre au 15 décem­bre 2012, 13.234 infir­miè­res, cadres infir­miers ou infir­miè­res spé­cia­li­sées ont répondu : 87 % de ces pro­fes­sion­nels infir­miers sont hos­ti­les aux moda­li­tés de ces coo­pé­ra­tions.

Des cen­tai­nes d’infir­miè­res répon­daient chaque jour, signe d’un inté­rêt cer­tain sur la ques­tion. Les répon­ses se fai­saient par mail, ce qui per­met­tait d’éviter les dou­blons (un seul vote comp­ta­bi­lisé par adresse mail).

Le refus d’un simple trans­fert d’actes pour gagner du temps médi­cal

Cette mesure déro­ga­toire est mas­si­ve­ment reje­tée car :
- 1) la for­ma­tion n’est pas vali­dante (sou­vent sur le tas, par le méde­cin qui sou­haite délé­guer cette tâche), et dif­fé­rente d’un endroit à l’autre. Les com­pé­ten­ces sont donc dis­cu­ta­bles, en par­ti­cu­lier la capa­cité de réagir cor­rec­te­ment en cas de pro­blème ou de com­pli­ca­tion.
- 2) ces nou­veaux actes sont pra­ti­qués sans reconnais­sance sta­tu­taire et sala­riale. C’est d’ailleurs une fonc­tion « klee­nex », dans la mesure où si le méde­cin s’en va, le pro­to­cole tombe, et l’infir­mière retourne à la case départ.
- 3) les ARS ont ten­dance à étendre les pro­to­co­les à d’autres régions, alors qu’il n’y aucune évaluation des résul­tats obte­nus (aucun pro­to­cole n’a un an d’exis­tence).

« Ces pro­to­co­les de coo­pé­ra­tion per­met­tent juste de régu­la­ri­ser des situa­tions exis­tan­tes, de léga­li­ser de petits arran­ge­ments locaux » selon Thierry Amouroux, le Secrétaire Général du SNPI CFE-CGC. Mais ces pro­to­co­les ne com­por­tent aucune garan­tie pour les usa­gers sur les qua­li­fi­ca­tions et les com­pé­ten­ces des pro­fes­sion­nels impli­qués, ainsi que sur la régu­la­rité et les moda­li­tés de leur exer­cice.

Les pra­ti­ques avan­cées doi­vent se faire en master 2

Pour Thierry Amouroux, la solu­tion réside dans une reconnais­sance offi­cielle et natio­nale de pra­ti­ques, avec une rému­né­ra­tion et une for­ma­tion consé­quen­tes. « Plutôt que cette coo­pé­ra­tion, propre à chaque hôpi­tal et à chaque ser­vice, nous sommes en faveur de pra­ti­ques avan­cées dans un cadre clair. Des pra­ti­ques auto­ri­sées après l’obten­tion d’un master 2, comme dans d’autres pays d’Europe. L’infir­mier aura alors toute sa légi­ti­mité et pourra exer­cer sur tout le ter­ri­toire, comme le fait un IADE aujourd’hui ».

Aujourd’hui, il existe déjà à l’Université d’Aix Marseille, le Master scien­ces cli­ni­ques infir­miè­res (can­cé­ro­lo­gie, géron­to­lo­gie, par­cours com­plexes de soins) et à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, le Master Sciences cli­ni­ques en soins infir­miers (santé men­tale, mala­dies chro­ni­ques, dou­leur et soins pal­lia­tifs). Il faut étendre ces Masters, en com­bi­nant la valo­ri­sa­tion de la VAE et la for­ma­tion uni­ver­si­taire pro­fes­sion­na­li­sante.

Bien entendu, à l’étranger seu­le­ment 5% des infir­miè­res font de tels mas­ters, mais cet échelon inter­mé­diaire entre l’infir­mière à Bac +3 et le méde­cin à Bac +9 est indis­pen­sa­ble, en par­ti­cu­lier pour la prise en soins des patients chro­ni­ques et des per­son­nes âgées.

Congrès natio­nal du SNPI

A l’occa­sion de son Congrès National, les 3 et 4 décem­bre 2012, les adhé­rents du SNPI, le syn­di­cat infir­mier de la CFE-CGC, ont voté à la quasi una­ni­mité contre les moda­li­tés actuel­les de ces coo­pé­ra­tions, qui sont juste une mau­vaise réponse aux pro­blè­mes de déser­ti­fi­ca­tion et de démo­gra­phie médi­cale. Car le déve­lop­pe­ment sou­hai­ta­ble des par­ta­ges de com­pé­ten­ces entre pro­fes­sion­nels de santé, ne doit pas être le pré­texte à faire n’importe quoi, juste pour libé­rer du temps médi­cal.

En matière d’actes cli­ni­ques, il convient de sou­li­gner que la rému­né­ra­tion d’une consul­ta­tion n’est liée ni à son niveau de dif­fi­culté ni à sa durée. Cela signi­fie que les consul­ta­tions médi­ca­les les plus sim­ples et les plus rapi­des (qui sont aussi celles qui sont consi­dé­rées comme pou­vant être éventuellement réa­li­sées par un autre pro­fes­sion­nel de santé) sont au final les plus « ren­ta­bles » pour les méde­cins. Ces der­niers n’ont donc pas d’inci­ta­tion finan­cière à confier la réa­li­sa­tion de ces consul­ta­tions à un autre pro­fes­sion­nel.

Voir également :
- INFIRMIER.COM : 87% des infir­miè­res hos­ti­les aux coo­pé­ra­tions inter­pro­fes­sion­nel­les
http://www.infir­miers.com/votre-car­riere/votre-car­riere/des-infir­mie­res-hos­ti­les-aux-coo­pe­ra­tions-inter­pro­fes­sion­nel­les.html
- ACTUSOINS.COM : Une large majo­rité d’infir­miè­res oppo­sée aux pro­to­co­les de coo­pé­ra­tion
http://www.actu­soins.com/12598/une-large-majo­rite-din­fir­mie­res-oppo­see-aux-pro­to­co­les-de-coo­pe­ra­tion.html
- ESPACEINFIRMIER.COM Les infir­miè­res pas prêtes à coo­pé­rer http://www.espa­cein­fir­mier.com/actua­li­tes/detail/61388/les-infir­mie­res-pas-pretes-a-coo­pe­rer.html
- SANTEMENTALE.FR : 87 % des infir­miè­res hos­ti­les aux trans­ferts d’actes


- SANTELOGCOM : 87% des infir­miè­res hos­ti­les aux coo­pé­ra­tions de l’arti­cle 51 de la loi HPST – SNPI
http://blog.san­te­log.com/2012/12/19/87-des-infir­mie­res-hos­ti­les-aux-coo­pe­ra­tions-de-lar­ti­cle-51-de-la-loi-hpst-snpi/
- EGORA : EGORA Les infir­miers rejet­tent les coo­pé­ra­tions inter pro­fes­sion­nel­les
http://www.egora.fr/sante-societe/orga­ni­sa­tion-des-soins/156403-les-infir­miers-rejet­tent-les-coop%C3%A9rations-inter­pro­fes­sio
- VEILLE PROSPECTIVE : 87% des infir­miè­res hos­ti­les aux coo­pé­ra­tions de l’arti­cle 51 de la loi HPST


- FHF : http://www.fhf.fr/Informations-Hospitalieres/Espace-cadres/Cooperations-pro­fes­sion­nel­les/Cooperation-quand-les-infir­miers-exe­cu­tent-des-actes-medi­caux

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