Collectif Infirmiers Anesthésistes d’Aquitaine : lettre à Bachelot

5 octobre 2010

Le Collectif Infirmiers Anesthésistes d’Aquitaine adresse une lettre ouverte à Madame Roselyne Bachelot-Narquin, Ministre de la Santé et des Sports, suite aux débordements policiers du 1er octobre 2010.

Madame la Ministre

Vendredi 1 octo­bre 2010, les infir­miers anes­thé­sis­tes orga­ni­saient leur 7ième jour­née natio­nale d’action. Depuis 7 mois, malgré une forte mobi­li­sa­tion, près de 90 % de gré­vis­tes, près d’un tiers de la pro­fes­sion a défilé dans Paris, sachant que vous étiez au minis­tère nous avions grand espoir de vous ren­contrer.

C’est en état de siège que nous avons trouvé le minis­tère. Dès le matin, il était entouré de mul­ti­ples forces de police et de camions anti émeutes, herses déployées. Une délé­ga­tion a été reçue par un conseiller : Mr Vaynes chargé du dia­lo­gue social mais qui nous le pré­cise à chaque fois : « je ne suis abso­lu­ment pas man­daté pour ouvrir des négo­cia­tions ».

Cette atti­tude de votre Ministère a conduit à l’exas­pé­ra­tion géné­rale. Après 7 mois de conflit, une simple visite de votre part à la délé­ga­tion pré­sente aurait été accueilli posi­ti­ve­ment et comme un signe d’ouver­ture.
L’ensem­ble de la pro­fes­sion s’est sentie bafouée de cette fin de non rece­voir. Ce sen­ti­ment a été exa­cerbé par votre inter­ven­tion radio­pho­ni­que du samedi 2 octo­bre qui n’est en rien un dia­lo­gue.

Nous avons assisté ensuite à des scènes d’une vio­lence inouïe proche d’un théâ­tre de guerre civile. Des char­ges de CRS ter­ri­bles, l’uti­li­sa­tion pour faire recu­ler les mani­fes­tants des camions anti émeutes, de gaz lacry­mo­gè­nes (dans un « péri­mè­tre poli­cier clos » ne per­met­tant à aucun mani­fes­tant de s’y sous­traire). En outre, l’emploi de forces de police en civil, non iden­ti­fiées, ayant une atti­tude pro­vo­ca­trice et des métho­des bru­ta­les s’appa­ren­tant plus à des tech­ni­ques de voyous que celles d’un main­tien de l’ordre répu­bli­cain a pro­fon­dé­ment choqué bon nombre de col­lè­gues.

Sachez, Madame la Ministre, qu’à ce jour, ces métho­des ont des consé­quen­ces psy­cho­lo­gi­ques graves sur bon nombre de pro­fes­sion­nels : qui en por­tera les consé­quen­ces ? Quelles jus­ti­fi­ca­tions pouvez-vous appor­ter à notre cor­po­ra­tion ?

De part notre fonc­tion nous por­tons des valeurs huma­nis­tes, et c’est pour­quoi nous défen­dons et défen­drons tou­jours notre pro­fes­sion.
Face à si peu d’écoute, il nous semble néces­saire de vous rap­pe­ler la base de nos reven­di­ca­tions :
 Maintien de l’exclu­si­vité d’exer­cice garan­tis­sant une haute sécu­rité en anes­thé­sie dans notre pays. Notamment un éclaircissement concer­nant l’arti­cle 51 de la loi HPST.
 Revalorisation sala­riale en adé­qua­tion avec notre niveau de for­ma­tion sous forme de grille sala­riale (pro­po­si­tion que la délé­ga­tion aurait pu vous pré­sen­ter lors de la ren­contre du 1er octo­bre).
 Reconnaissance de la péni­bi­lité de cette pro­fes­sion où le mode d’exer­cice nous impose le tra­vail en continu, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 avec un haut niveau de stress, de com­pé­tence et de rigueur.
 Reconnaissance du diplôme d’état d’infir­mier anes­thé­siste au niveau Master. Des enga­ge­ments sont pris par le Ministère de l’ensei­gne­ment supé­rieur concer­nant les nou­veaux diplô­més de 2013. Nous atten­dons des répon­ses quand aux condi­tions de mas­te­ri­sa­tion des IADE en fonc­tion.

Au delà du choc et du trau­ma­tisme que les métho­des de ven­dredi ont créé votre minis­tère doit repren­dre le dia­lo­gue sous d’autres formes. Il doit rece­voir et ouvrir une véri­ta­ble négo­cia­tion avec cette pro­fes­sion res­pon­sa­ble fai­sant preuve de cou­rage et d’unité. Il doit repren­dre et dis­cu­ter des quatre points reven­di­ca­tifs. Il ne peut lais­ser notre pro­fes­sion, acteur majeur de la santé en France, sans pers­pec­tive ce qui condui­rait à des actions de déses­poir et au blo­cage social.

Nous vous deman­dons Mme la minis­tre d’enten­dre enfin notre pro­fes­sion.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, nos salu­ta­tions dis­tin­guées.

Le col­lec­tif iade d’Aquitaine
ciade.aqui­taine chez gmail.com

Partager l'article
     

Rechercher sur le site


Dialoguer avec nous sur Facebook
Nous suivre sur Twitter
Nous suivre sur LinkedIn
Suivre notre Flux RSS

Soignants pressurés : travailler plus sans gagner plus, encore une fois

Travailler plus, sans être mieux payé. C’est la logique brutale qui se cache derrière la (…)

Protection sociale : les exonérations creusent le déficit, pas les soins

Le déficit de la Sécurité sociale existe, oui. Mais il est faible. Ce qui est grave, ce sont les (…)

Infirmières reléguées, soins déshumanisés : la vision inquiétante du MEDEF

Déficits, vieillissement de la population, explosion des maladies chroniques  : les constats du (…)

Infirmières retraitées en mission : l’État punit celles qu’il applaudissait hier

Les infirmières ont porté le système à bout de bras pendant la pandémie. Les infirmières (…)

Cadres infirmiers : les piliers invisibles d’un hôpital qui vacille

Ils tiennent les services à bout de bras. Absents des projecteurs médiatiques, oubliés des (…)

Canicule à l’hôpital : des vies en danger, faute d’adaptation

Chaque été, la chaleur revient. Et avec elle, les morts évitables. Malgré les alertes, la France (…)