Syndrome d’épuisement professionnel (burnout) : repérage et prise en charge

3 septembre 2018

La Haute Autorité de santé (HAS) a publié une fiche mémo sur le syn­drome d’épuisement pro­fes­sion­nel, de façon à amé­lio­rer son repé­rage, sa prise en charge et l’accom­pa­gne­ment des per­son­nes lors de leur retour à l’acti­vité pro­fes­sion­nelle.

Gros bémol, ce tra­vail se limite au volet cli­ni­que du thème : l’action sur le milieu et sur l’orga­ni­sa­tion du tra­vail est exclue du champ de ces recom­man­da­tions.

C’est un état d’ « épuisement phy­si­que, émotionnel et mental qui résulte d’un inves­tis­se­ment pro­longé dans des situa­tions de tra­vail exi­gean­tes sur le plan émotionnel ». Concrètement, face à des situa­tions de stress pro­fes­sion­nel chro­ni­que, la per­sonne en bur­nout ne par­vient plus à faire face.

Le bur­nout concerne de façon pré­gnante les pro­fes­sions soi­gnan­tes. Pour celles-ci, le rap­port à l’autre est essen­tiel. Il cons­ti­tue un enjeu, par­fois vital, pour les patients, béné­fi­ciai­res de la rela­tion.

Le pro­fes­sion­nel de santé en acti­vité ou en for­ma­tion est par­ti­cu­liè­re­ment touché par l’épuisement pro­fes­sion­nel. Différents fac­teurs le ren­dent vul­né­ra­ble : confron­ta­tion avec la souf­france et la mort, prises en charge exi­geant d’être impli­qué dans l’inti­mité des patients, dis­po­si­tifs de soin com­plexes, ten­sions démo­gra­phi­ques, insé­cu­rité… Les soi­gnants néces­si­tent donc une prise en charge spé­ci­fi­que via un réseau de soins adapté.

Le syn­drome recou­vre trois dimen­sions : l’épuisement émotionnel, le cynisme vis-à-vis du tra­vail (déshu­ma­ni­sa­tion, indif­fé­rence) et la dimi­nu­tion de l’accom­plis­se­ment per­son­nel au tra­vail et de l’effi­ca­cité pro­fes­sion­nelle.

Le syn­drome d’épuisement pro­fes­sion­nel n’est pas une mala­die carac­té­ri­sée. Une démar­che diag­nos­ti­que est donc néces­saire : elle vise à évaluer la sévé­rité du trou­ble et ses liens avec les condi­tions de tra­vail. Elle a aussi pour but de carac­té­ri­ser le syn­drome en repé­rant d’éventuels états sous-jacents (trou­ble de l’adap­ta­tion, trou­ble anxieux, trou­ble dépres­sif ou état de stress post-trau­ma­ti­que).

L’ana­lyse des condi­tions de tra­vail est réa­li­sée, en prio­rité, avec le méde­cin du tra­vail ou le centre de consul­ta­tion de patho­lo­gie pro­fes­sion­nelle (notam­ment pour les per­son­nes ne dis­po­sant pas de méde­cin du tra­vail).

Lors de cette démar­che diag­nos­ti­que, il est essen­tiel d’évaluer le risque sui­ci­daire.

Quelles sont les mani­fes­ta­tions cli­ni­ques du bur­nout ?

Le bur­nout peut se tra­duire par des mani­fes­ta­tions plus ou moins impor­tan­tes, d’ins­tal­la­tion pro­gres­sive, sou­vent insi­dieuse, qui sont en rup­ture avec l’état anté­rieur. Ces mani­fes­ta­tions peu­vent être d’ordres
 émotionnel (anxiété, ten­sions mus­cu­lai­res, tris­tesse, manque d’entrain, irri­ta­bi­lité, hyper­sen­si­bi­lité, absence d’émotion…),
 cog­ni­tif (trou­bles de la mémoire, de l’atten­tion, de la concen­tra­tion…),
 com­por­te­men­tal (repli sur soi, iso­le­ment, com­por­te­ment agres­sif, dimi­nu­tion de l’empa­thie, res­sen­ti­ment et hos­ti­lité, com­por­te­ments addic­tifs…)
 ou moti­va­tion­nel (désen­ga­ge­ment pro­gres­sif, baisse de moti­va­tion et de moral, effri­te­ment des valeurs asso­ciées au tra­vail, déva­lo­ri­sa­tion).

Des mani­fes­ta­tions d’ordre phy­si­que non spé­ci­fi­ques peu­vent aussi être pré­sen­tes : asthé­nie, trou­bles du som­meil, trou­bles mus­culo-sque­let­ti­ques (lom­bal­gies, cer­vi­cal­gies…), cram­pes, cépha­lées, ver­ti­ges, ano­rexie, trou­bles gastro-intes­ti­naux.

Existe-t-il des fac­teurs de risque ?

Il existe effec­ti­ve­ment des fac­teurs de risque, la démar­che diag­nos­ti­que impli­que de les recher­cher. Cette recher­che com­mence par l’ana­lyse des condi­tions de tra­vail. Elle repose sur une démar­che struc­tu­rée, coor­don­née par le méde­cin du tra­vail avec l’appui de l’équipe plu­ri­dis­ci­pli­naire (ergo­nome, psy­cho­lo­gue du tra­vail…).

Elle peut s’appuyer sur les 6 caté­go­ries de fac­teurs de risque psy­cho­so­ciaux sui­van­tes (rap­port Gollac) :
 inten­sité et orga­ni­sa­tion du tra­vail (sur­charge de tra­vail, impré­ci­sion des mis­sions, objec­tifs irréa­lis­tes…) ;
 exi­gen­ces émotionnelles impor­tan­tes avec confron­ta­tion à la souf­france, à la mort, dis­so­nance émotionnelle ;
 auto­no­mie et marge de manœu­vre ;
 rela­tions dans le tra­vail (conflits inter­per­son­nels, manque de sou­tien du col­lec­tif de tra­vail, mana­ge­ment délé­tère…) ;
 conflits de valeurs ;
 insé­cu­rité de l’emploi.

Le repé­rage col­lec­tif est réa­lisé par l’équipe de santé au tra­vail coor­don­née par le méde­cin du tra­vail à partir d’un ensem­ble de signaux liés au fonc­tion­ne­ment de la struc­ture (absen­téisme, turn over fré­quent, qua­lité de l’acti­vité et des rela­tions socia­les…) ou à la santé et à la sécu­rité des tra­vailleurs (acci­dents du tra­vail, mala­dies pro­fes­sion­nel­les, visi­tes médi­ca­les spon­ta­nées, inap­ti­tu­des…).

Quelle prise en charge pro­po­ser ?

La prise en charge vise, bien sûr, à trai­ter le trou­ble iden­ti­fié, mais également à agir sur le contexte socio­pro­fes­sion­nel à l’ori­gine du syn­drome. La pres­crip­tion d’un arrêt de tra­vail est le plus sou­vent néces­saire.

Le méde­cin trai­tant coor­donne la prise en charge. L’inter­ven­tion d’un psy­chia­tre peut être sol­li­ci­tée notam­ment pour réa­li­ser un diag­nos­tic psy­cho­pa­tho­lo­gi­que ou une adap­ta­tion thé­ra­peu­ti­que, pren­dre en charge un trou­ble sévère ou renou­ve­ler un arrêt mala­die.

Si le patient souf­fre de trou­bles anxieux ou dépres­sifs, un trai­te­ment par anti­dé­pres­seurs peut être pres­crit.

Le trai­te­ment du trou­ble peut com­por­ter une prise en charge non médi­ca­men­teuse fondée sur des inter­ven­tions psy­cho­thé­ra­peu­ti­ques ou psy­cho­cor­po­rel­les effec­tuées par un pro­fes­sion­nel de santé ou un psy­cho­lo­gue formé à ces tech­ni­ques.

L’ana­lyse du poste et des condi­tions de tra­vail est indis­pen­sa­ble. Elle est réa­li­sée par l’équipe plu­ri­dis­ci­pli­naire coor­don­née par le méde­cin du tra­vail. Des actions de pré­ven­tion (indi­vi­duelle et/ou col­lec­tive) sont pré­co­ni­sées en consé­quence. En accord avec le patient, il est essen­tiel que le méde­cin trai­tant se mette en contact avec le méde­cin du tra­vail ou celui d’une consul­ta­tion de patho­lo­gie pro­fes­sion­nelle pour aler­ter et avoir un éclairage sur les condi­tions de tra­vail.

La prise en charge des aspects médico-socio­pro­fes­sion­nels et psy­cho­lo­gi­ques est indis­pen­sa­ble, notam­ment pour aider les patients dans les démar­ches médico-admi­nis­tra­ti­ves : orien­ta­tion vers les consul­ta­tions de patho­lo­gie pro­fes­sion­nelle, ser­vi­ces d’assis­tante sociale…

Pour en savoir plus :
 Repérage et prise en charge cli­ni­ques du syn­drome d’épuisement pro­fes­sion­nel ou bur­nout https://www.has-sante.fr/por­tail/jcms/c_2769318/fr/repe­rage-et-prise-en-charge-cli­ni­ques-du-syn­drome-d-epui­se­ment-pro­fes­sion­nel-ou-bur­nout

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